Initiative sur l’immigration : un « tiens » vaut mieux que deux « tu l’auras »

Chronique publiée dans le Nouvelliste du 22 janvier 2014.
Le 9 février, un oui à l’initiative sur l’immigration signifiera la dénonciation des accords bilatéraux. Nous pouvons choisir une autre voie, nous devons toutefois le faire en connaissance de cause. Nous, le peuple, devons faire une pesée d’intérêts, un pari sur l’avenir.
Les avantages des accords bilatéraux compensent-ils leurs inconvénients ? En dix ans, l’Europe et le monde ont traversé des crises à répétition : crash du Nasdaq, bulle immobilière et endettement public massif. Des pays du continent ont frôlé la cessation de paiement, d’autres ont puisé dans les comptes des épargnants, certains ont vu le taux de chômage des jeunes flirter avec la barre des 50%.
La Suisse, dans l’œil du cyclone, s’en tire plutôt bien. Le chômage est bas, la croissance solide. Les salaires ont augmenté, pas de manière égale pour tous, mais la tendance est positive. Des cas de dumping salarial et des problèmes d’infrastructures constituent le revers de la médaille, à ne pas minimiser. Néanmoins, nous avons tiré notre épingle du jeu. Les bilatérales, si elles ne furent pas la solution unique, ont contribué à ce succès. Notre réussite, nous la devons à un ensemble de conditions-cadres conçues avec finesse et subtilité.
Dans ce contexte, est-il opportun de démolir les bilatérales ? C’est un pari dangereux, il faudra renégocier. L’UE a déjà annoncé qu’elle n’entendait pas offrir des conditions meilleures à la Suisse. On ne peut pas démissionner et continuer à percevoir son salaire ; la Suisse ne peut pas résilier des accords et espérer bénéficier uniquement des points qui nous arrangent. Or, les négociations menées ces dernières années illustrent le peu de bienveillance du monde à notre égard. Il suffit de lire le projet de convention franco-suisse sur les successions pour se convaincre que d’éventuels nouveaux accords seraient négociés sur un champ de mine, pas forcément dans notre intérêt.
La force de la Suisse repose sur sa stabilité juridique. Les victimes de la Lex Weber savent combien les incertitudes législatives sont dévastatrices. Dénoncer les bilatérales, c’est ouvrir une boîte de pandore. C’est emprunter une voie dont on ignore tout. Avec le système actuel, imparfait, nous savons au moins à quoi nous attendre. Un « tiens » valant mieux que deux « tu l’auras », je dirai non le 9 février.