Loi sur l’asile : une procédure juste, sévère et nécessaire

Soixante ans après que son peuple cherchait refuge dans le reste de l’Europe pour fuir l’écrasement soviétique, la Hongrie tend des barbelés aux frontières. Alors que d’autres pays pensent à lui emboîter le pas, il est temps de rappeler que les Etats civilisés ont adhéré dans les années 1950 à la convention de Genève sur le statut des réfugiés qui impose aux parties contractantes d’assurer une protection à celles et ceux qui fuient des persécutions et des conflits armés, et le 5 juin, nous voterons une loi sur l’asile qui permet d’appliquer avec rigueur mais humanité ce principe.
Les obligations relatives à l’asile n’imposent pas, contrairement à ce qu’on pourrait le penser, d’accueillir « toute la misère du monde ». Si les réfugiés dits économiques ne peuvent pas prétendre à l’asile, les pays d’Europe ont une obligation morale et juridique d’offrir à celles et ceux qui traversent la méditerranée, avec femmes et enfants, au péril de leur vie, une procédure digne qui leur permette d’être au moins écoutés avant que l’on ne tranche de leur sort.
Depuis quelques mois, l’Europe est complètement dépassée. Les frontières se ferment et on imagine régler la procédure de l’asile en laissant les passeurs faire le travail des douaniers. Certaines personnes attendent depuis des mois dans la boue aux frontières, on retrouve des cadavres dans un camion frigorifique, des milliers d’enfants errent sur le continent, à la merci des trafiquants d’êtres humains. Pourtant, régler la question migratoire est une des tâches fondamentales d’un Etat organisé et moderne qui ne peut décemment s’en débarrasser sous prétexte qu’elle est peu populaire.
La nouvelle loi sur l’asile n’a pas pour objet de définir qui a le droit et qui n’a pas le droit de bénéficier de la protection de la Suisse. Ces questions ont déjà été liquidées. Cette révision vise uniquement à adapter la procédure à la nouvelle réalité, pour pouvoir traiter plus efficacement un nombre grandissant de dossiers, pour éviter que les requérants d’asile ne poireautent des mois durant dans les centres cantonaux en attendant un oui ou un non, ce qui n’arrange personne.
Pour y parvenir, le Parlement a décidé de constituer des centres fédéraux, dans lesquels l’on trouvera l’ensemble des protagonistes de l’asile. Les délais de recours ont été divisés par trois. Chaque requérant d’asile se verra conseiller par un juriste qui assurera un lien entre l’administration et l’administré, permettant d’éviter les procédures qui n’en finissent plus comme c’est le cas aujourd’hui. Ces fameux « avocats gratuits » comme les appellent les référendaires seront, contrairement aux avocats commis d’office aujourd’hui, rémunérés forfaitairement et n’auront plus d’intérêt à recourir par principe.
Cette procédure a été testée, depuis plusieurs années, dans un centre pilote à Zurich, à très grande satisfaction. Les procédures sont courtes, les requérants obtiennent une réponse rapidement sur leur sort. On évite qu’ils ne finissent à l’aide sociale et ceux qui ne peuvent pas rester sont expulsés. Appliquée à l’échelle suisse, cette nouvelle procédure permettra d’économiser 110 millions de francs par année.
Pour constituer les dix futurs centres fédéraux, la loi prévoit une procédure d’approbation des plans avec, à la clef, une option d’expropriation, épouvantail des opposants. Cette expropriation n’a pourtant rien d’original. Elle est prévue pour toutes les tâches de la Confédération : on l’a introduite pour la construction des lignes de chemin de fer, des lignes électriques, pour les installations militaires et même pour les remontées mécaniques touristiques. Elle ne peut être appliquée qu’en dernier recours, si aucune autre option n’est possible. Il n’y a pas de quoi fouetter un chat, sauf à considérer que la réponse au problème de l’asile est de fermer les frontières, de rejeter à la mer ceux qui fuient les bombes en se félicitant d’être bien né.
Un pays qui a la prétention d’organiser des jeux olympiques, d’accueillir des dizaines de milliers de spectateurs pendant quelques semaines, dans des conditions luxueuses, avec des infrastructures touristiques et sportives y-relatives ne peut pas décemment prétendre être incapable d’offrir à autant de miséreux fuyant la guerre une procédure digne. Et il n’est pas question ici de leur offrir l’asile, mais uniquement de leur donner une réponse à leur demande d’aide. De ne pas détourner le regard. Et c’est ce à quoi servira la nouvelle loi sur l’asile.