Extinction Rebellion, ou l’art d’enfoncer les portes ouvertes

Une cinquantaine de ses militants ont tenu une manifestation illicite devant le Palais fédéral, nécessitant le déploiement d’une colonne de policiers pour assurer le fonctionnement de la session. Tout cela pour trois revendications, dont l’institution d’un parlement démocratique.

«Ce n’est que le début.» C’est avec ce message au ton un peu menaçant que le groupuscule Extinction Rebellion, XR pour les intimes, s’est réuni sur la place Fédérale, pendant la session. La veille, une petite note du bureau du National avait été adressée aux députés. Nous étions invités à rejoindre nos sièges en catimini. Par les annexes du parlement, histoire d’éviter la confrontation avec des manifestants qui se réunissaient sans autorisation, pour déverser des litres de faux sang sur le parvis du Palais.

Ce genre de démonstration de force n’est pas du goût des élus. Deux cent quarante-six élus du peuple face à une poignée de mécontents: le jeu démocratique et numérique voulait que les premiers l’emportent. Et nous l’avons emporté.

Un militant de XR a néanmoins eu l’occasion de me tendre un papillon alors que je traversais le cordon de police. Ils y revendiquaient la mise en place «d’assemblées citoyennes locales et nationales pour assurer une transition juste et démocratique». Quelle idée de génie.

On pourrait réunir dans une ville suisse, à Berne par exemple, des représentants choisis par les citoyens pour débattre et décider des sujets d’avenir du pays. On renouvellerait leur mandat régulièrement. Pour ensuite tenter de les empêcher de travailler en tenant des manifestations illégales. A ce niveau-là, on enfonce des écluses ouvertes.

Réclamer ce qui existe déjà…

A coups de pancartes, de flyers et de chants, on réclame ce qui existe. Il est consternant de voir tant de citoyens ignorer tout ce qui se fait déjà. Aussi pour le climat. Des milliards de subventions pour isoler les bâtiments? Ça se fait. Des dizaines de milliards pour les transports publics? On les a appelés Rail 2000, FAIF, PRODES et NLFA. On peut encore citer pêle-mêle la RPC, la réduction des produits phytosanitaires, les paiements directs pour l’écologie dans l’agriculture. Les taxes poubelles, CO2et sur tous les produits chimiques possibles et imaginables. Tout cela existe déjà. Et produit des effets: un Suisse moyen émet 4,3 tonnes de CO2 en 2018 contre 6,8 en 1970.

Certes, ce n’est pas assez. Certes, on doit en faire davantage. On en fera davantage. Mais je doute que verser des litres de faux sang sur la place Fédérale, fût-il issu de l’agriculture biologique, ne résolve efficacement le problème.