L’heure de gloire des lobbyistes

Avec l’arrivée des élections fédérales, les groupes d’intérêt de toutes sortes publient les classements des bons et des mauvais élus. De ceux qu’il faut cumuler, de ceux qu’il faut tracer. Forcément subjectifs, ces «rankings» sont leur revanche.

Lobbyiste. Peut-être le pire métier du monde. Attendre devant la porte. Quémander une rencontre avec un élu qui n’y comprend rien. Et qui vous perçoit comme le porte-serviettes de la dernière des corporations. Subir les petites humiliations quotidiennes. Poireauter des heures à l’entrée du Palais. Pour se voir rembarré au dernier moment. Et finir dépeint comme la corruption personnifiée.

Quel masochisme!

Les plus téméraires tentent systématiquement d’approcher les élus du parti le plus éloigné de l’objet défendu. Un PLR pour saborder un accord de libre-échange. Un UDC pour interdire les armes à sous-munition. Un socialiste pour réduire l’impôt sur la fortune. Quelle abnégation. Quel masochisme. S’il y a un job que je fuirais, c’est bien celui-là. Je le classe dans la même catégorie que télémarketeur. Ces gens qui vous appellent n’importe quand pour vous vendre n’importe quoi. Et dont vous n’avez pas envie, par principe.

On peut comprendre que tous ces lobbyistes prennent leur revanche avec les élections. Ils tiennent enfin l’occasion de cogner sur ceux qui ont commis l’outrage de ne pas partager leurs préoccupations. Ou celles de leur client. Ou de leur employeur. De lobbyistes, les divers et variés groupes d’intérêt deviennent ainsi dénonciateurs publics. Et pondent des rankings de toutes sortes. Espérant faire pleuvoir les coups de crayon fatals sur la tête des candidats hermétiques à leurs causes.

Sus aux affreux jojos

Par exemple, les organisations écologistes publient un écorating. Ou coco-rating. On y épingle les affreux jojos dont le pain quotidien s’est résumé pendant quatre ans à détruire notre environnement. Forcément, c’est un peu biaisé. On s’inquiète surtout que vous partagiez la conscience écologiste des organisations qui téléguident le classement. Pour peu que vous acceptiez toutes les nouvelles interdictions, les nouvelles lois, les nouvelles taxes, vous êtes dans le camp du bien. Avec une invitation à peine voilée à biffer les mal classés.

L’heure du jugement est ainsi venue. Les consommateurs, les arts et métiers, les tireurs, les paysans, et même ceux qui veulent l’interdiction de la 5G s’y sont mis. La liste des candidats à biffer s’allonge, se recoupe, se contredit. Et c’est dans ces moments que, pour la seule fois de la législature, je voudrais pratiquer le pire métier du monde. Juste une fois. Juste le temps d’une élection.