Rose-vert-grève: la fin de la lune de miel

Le lancement du référendum contre la loi sur le CO2 par un grand nombre de sections de la grève du climat met un terme brutal à l’osmose curieuse que la gauche institutionnelle faisait mine de vivre avec les milieux intégristes de l’écologie.

Étrange automne qui conjugue des records de chute de neige, Roland Garros et l’alliance surprenante de la grève du climat et de l’union pétrolière pour lancer un référendum contre la loi CO2.

Jusqu’ici, tout pourfendeur du mouvement portait la marque du vieux ringard. Rôle que j’endosse avec un plaisir masochiste. Il était mal vu de ne pas s’émouvoir devant le sens civique des manifestants. A qui les nostalgiques d’un mai 68 idéalisé offraient une totale immunité, face aux multiples incohérences de la génération la plus prospère, la plus low cost, la plus carbonée et la plus vindicative sur ces mêmes questions. Sans parler de l’amnistie des grèves organisées exclusivement durant le temps scolaire.

Il aura suffi de passer aux choses sérieuses, d’adopter – enfin – la loi sur le CO2, pour que s’éteigne la béatitude des gens de bonne volonté. La grève du climat ne veut pas de cette loi. C’est son droit le plus strict. Rien ne lui a jusqu’ici été refusé, il était attendu qu’une loi de compromis ne pourrait pas lui convenir.

Mais il est tordant de voir le chef du groupe socialiste essuyer un « Ok boomer », une semaine après avoir mendié la sympathie des jeunes en brandissant un drapeau « Klimastreik » sur la place fédérale. De voir des écologistes bon teint, dépassés sur leur côté jardin, expliquer que même pour le climat, on doit trouver des solutions réalistes.

La loi sur le CO2 est un compromis ambitieux qui permettra à la Suisse de tenir ses engagements. Même un peu mieux. Réduire de 50% nos émissions d’ici 2030. Atteindre le zéro net en 2050. Un vrai parcours du combattant nous attend, fait de restrictions, de taxes, de normes. Limiter le réchauffement climatique ne sera ni facile, ni agréable.

A refuser tout compromis, ces milieux qui réclamaient à cor et à cri un changement sont prêts à tout détruire plutôt que de n’être exaucés que partiellement. Que les deux extrêmes rejettent cette loi est sans doute la preuve de sa bonne facture.

On est loin du projet décroissant des intégristes écologistes, celui que les élites rose-vertes observaient il y a encore dix jours avec un regard paternaliste, en se disant qu’il sera toujours temps de le capter. La grève du climat fait son adolescence et les sociaux-traitres au pouvoir mèneront demain une campagne aux côtés des forces obscures et bourgeoises pour défendre une loi de compromission. Quitte à passer pour des vieux ringards, à leur tour.