Procès Credit Suisse: à vaincre sans péril…

Treize avocats ont défendu gratuitement les 12 grévistes du climat qui se sont déguisés en tennismen, qui n’ont pas manqué de paroles fortes pour qualifier leur engagement. Et obtenu un acquittement surprenant.

Vous n’avez pas manqué le procès des héros du climat, pour une banale affaire de violation de domicile. Les grévistes ont tenu un interclubs entre des bancomats et des guichets du Credit Suisse. La gravité des faits est toute relative, comme l’a relevé le tribunal. Et pourtant, ils font durer le spectacle depuis plus d’une année.

Dans le fond, le pire des dénouements pour la cause est peut-être cet acquittement. Qu’on admette que leur promenade dans le hall de la banque était une rigolote réunion de jeunes déguisés, pas bien méchante, pas bien grave.

Le souvenir de Rosa Parks

Ce n’est pas innocent si, pour cette broutille, 13 ténors du barreau se sont passé le mot pour faire des militants grimés en Björn Borg des Martin Luther King de la cause environnementale. Curieuse stratégie pour minimiser la gravité des actes. Ils en ont fait beaucoup, même trop. Pour que l’acte paraisse historique. On y a même évoqué Rosa Parks, la «mère» du mouvement des droits civiques américains dans les années 1950.

Quand Rosa Parks a refusé de se lever du siège du bus réservé aux Blancs, elle n’était pas déguisée. Elle a défendu son droit fondamental à être traitée comme un être humain. On peut difficilement mettre sur un même pied l’attitude des 12 tennismen et celui, autrement plus courageux, d’une femme qui, seule, sans l’appui d’une foule de manifestants massée derrière les vitres de l’autocar, sans le soutien d’une ribambelle d’avocats et de la complaisance médiatique ambiante, est restée assise à la place d’un homme blanc. Là où l’on battait les Noirs pour moins que cela. Parfois à mort. La comparaison est outrancière.

Des lanceurs d’alerte?

On les a aussi présentés comme des lanceurs d’alerte. Ces gens qui risquent leur carrière, leur famille, leur vie, parfois, pour révéler un secret que personne ne devait savoir. Ici, ils ont proclamé publiquement des faits notoires. Sans rien risquer de sérieux.

A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Ce n’est qu’au prix d’une condamnation que ces héros à la petite semaine seraient sortis gagnants. Qu’ils auraient acquis les titres de noblesse de ceux qui se sont sacrifiés pour leur cause, à moindres frais.

Comme au tennis, les accusés avaient un partenaire: le Credit Suisse. Si j’avais coaché la banque, je lui aurais conseillé de déclarer forfait. De retirer la plainte. Et de proclamer avec un petit sourire en coin, après l’ordonnance pénale rendue antérieurement, qu’il faut que jeunesse se passe.