A Berne, à l’heure de la moustache de Plekszy-Gladz

Les visites officielles étrangères sont l’occasion de cirques parlementaires amusants, inutiles mais récréatifs. La délégation hongroise en a fait les frais lorsqu’une petite partie du parlement a déserté ses rangs et qu’une autre applaudissait à tout rompre.

A Berne, l’exotisme vient à nous. Entre deux Berner Teller et les discours d’Ueli Maurer, nous recevons régulièrement des délégations du monde entier. Seize l’année passée, dont le Burkina Faso, l’Arménie ou la Biélorussie. Selon un protocole bien huilé, les officiels s’installent quelques minutes à la tribune d’honneur, la présidente leur adresse un petit mot sur l’amitié historique qui unit nos pays, on se lève, on applaudit.

Fondateur du Fidesz

La semaine passée, nous avons ainsi vécu à l’heure hongroise. D’un côté, nous accordions un milliard pour les pays de l’Europe de l’Est , parmi lesquels la Hongrie. De l’autre, nous recevions le premier citoyen magyar, László Kövér, en visite officielle et remarquée. L’homme a fondé le Fidesz, ce parti ultraconservateur, anti-immigration et populiste. Celui qui vient de se faire expulser manu militari du Parti populaire européen. Mais ce qui en imposait le plus, c’était encore la moustache du président, tout droit sortie du Sceptre d’Ottokar.

Quand on marche sur des œufs

La visite ne s’est pas déroulée sans tumulte. Lors d’un dîner officiel, j’ai pu admirer toute la subtilité de notre diplomatie. Quand vous avez à votre table le représentant de l’une des démocraties les plus critiquées du continent, vous marchez sur des œufs. Alors on met les formes pour exposer nos visions du respect des réfugiés de guerre ou de l’intégration. Surtout à un membre du parti qui prône l’installation de barbelés pour accueillir les migrants syriens. Surtout au représentant d’un pays dont 200 000 ressortissants avaient trouvé l’asile, notamment en Suisse, en 1956. Quand les communistes faisaient ce qu’ils savent le mieux faire, écraser les individus.

Tout s’est achevé par un cérémonial haut en couleur. Au National, au moment de saluer notre hôte. A gauche, les «Maduro Boys», échaudés par le visiteur, ont pratiqué la politique de la chaise vide pour marquer leur colère contre celui à qui ils avaient versé, la veille, beaucoup d’argent. A droite, les aficionados d’Orban applaudissaient le «messie», lui offrant même un groupe d’amitié parlementaire. Et faisaient mine d’oublier qu’ils avaient refusé de sortir le crapaud pour leur grand copain le jour d’avant. La voie de la sagesse se situe certainement entre les deux.