Catégorie : Énergie

  • Quelles mesures fiscales pour accélérer l’amélioration énergétique des bâtiments ?

    Quelles mesures fiscales pour accélérer l’amélioration énergétique des bâtiments ?

    Le parc immobilier consomme près de 100 TWh, ce qui correspond à 45% environ de la consommation finale d’énergie en Suisse. Il génère aussi presque un tiers des émissions de CO2 sur notre territoire. Améliorer énergétiquement les bâtiments en Suisse en les isolant ou en installant des panneaux photovoltaïques constitue une priorité pour la Confédération et un objectif souhaitable pour le climat.

    Or, une part non-négligeable des bâtiments à rénover appartient à des particuliers qui pourraient être davantage incités à agir.

    Le Conseil fédéral peut-il exposer succinctement s’il estime judicieux et efficace d’introduire sur le plan fédéral les instruments fiscaux suivants :

    • uniformiser sur le plan national et permettre un report des déductions pour rénovation énergétique sur une période de cinq ans ;
    • permettre une sur-déduction des investissements énergétiques d’un coefficient de un et demi ;
    • interdire la réestimation de la valeur des bâtiments par les autorités fiscales suite à une rénovation énergétique, afin d’éviter que les rénovations n’entraînent une augmentation de la valeur locative, de l’imposition de la fortune ou de l’impôt foncier.
  • Favoriser la production d’électricité renouvelable par une meilleure répartition des taxes d’utilisation du réseau

    Favoriser la production d’électricité renouvelable par une meilleure répartition des taxes d’utilisation du réseau

    Motion déposée le 30 septembre 2021 au Conseil national

    Le Conseil fédéral est invité à proposer une modification de la législation concernée, notamment la loi sur l’énergie (LEne) ou de la loi sur l’approvisionnement en électricité (LApEl), qui prévoira que les diverses taxes, timbres ou contributions payées par le consommateur final pour l’utilisation du réseau électrique soient versées au producteur local d’électricité dans la mesure où le réseau électrique n’est pas mis à contribution.

     

    Développement

    La loi sur l’énergie fixe la rétribution des petits producteurs d’électricité pour les kilowattheures injectés sur le réseau électrique, dans le but de favoriser la production d’énergies renouvelables.

    En pratique, ces kWh sont consommés à proximité directe, par les consommateurs voisins du même quartier. En effet, l’électricité qui n’est pas directement auto-consommée est injectée sur le réseau pour être consommée par des tiers, les règles de la physique veulent toutefois que c’est le consommateur le plus proche qui bénéficiera de cette production.

    Ce dernier consommateur paie, avec sa facture d’électricité, pour chaque kWh consommé, diverses taxes et contributions destinées à financer le réseau électrique local, régional et national. Or, s’agissant de la consommation des kWh produits localement par des petites installations énumérées à l’art. 19 LEne, ceux-ci ne mettent jamais à contribution le réseau national ou régional. Ces contributions sont ainsi versées sans contrepartie.

    A l’inverse, le producteur d’électricité a financé l’essentiel du réseau le reliant à son quartier. Il se justifie ainsi que le produit des taxes d’utilisation du réseau soit versé à l’acteur qui fournit une prestation et non à des tiers qui ne sont pas concernés par cette production et consommation.

    La présente motion vise ainsi à établir une règle de calcul pour que les producteurs perçoivent la partie des taxes de raccordement actuellement sans contrepartie qui sera ajoutée au prix versé pour l’énergie injectée dans le réseau, permettant ainsi sans contribution publique supplémentaire un encouragement considérable à la production d’énergies renouvelables.

  • Motion: "Marché de l’électricité. Libéralisation des compteurs."

    Motion: "Marché de l’électricité. Libéralisation des compteurs."

    Motion déposée le 29 septembre 2017 au Conseil national.

    Le Conseil fédéral est chargé de proposer une modification des bases légales qui prévoit que la vente, la location et l’installation des systèmes de mesure et de commande, ainsi que les prestations de service et de mesure (lecture, traitement et transmission des données) ne soient pas réservées aux exploitants des réseaux.
    Développement
    Par arrêt du 14 juillet 2017, le Tribunal fédéral a constaté qu’il n’existait pas de monopole concernant les systèmes de mesure, dans certains cas et à certaines conditions.
    S’il est nécessaire d’assurer l’installation de systèmes de mesure et de commande, ordinaires et de nouvelle génération, il n’est pas nécessaire d’établir un monopole en la matière.
    La loi sur l’approvisionnement en électricité (LApEl) dispose que les prescriptions relatives aux systèmes de mesure sont déterminées par le Conseil fédéral et ces installations ne peuvent être réalisées que par des professionnels. En tout état de cause, l’ouverture proposée reste très encadrée.
    L’on a pu constater durant les années écoulées que le marché des systèmes de mesure s’avérait très intéressant pour les distributeurs qui amortissaient plusieurs fois les appareils loués en l’espace de quelques années, au détriment des consommateurs et des investissements dans les installations électriques. L’objectif du présent amendement est d’offrir une approche pragmatique et consensuelle pour une ouverture au moins partielle du marché, qui assurera aux consommateurs qui en ont le besoin une diversité de choix, en faveur d’une utilisation efficiente de l’énergie et en faveur de l’innovation au sein des PME.
    Le Conseil fédéral étudiera ainsi dans quelle mesure il est opportun de prévoir une libéralisation en faveur de tous les consommateurs ou de la limiter à certaines catégories de consommateurs, pour garantir l’efficience du système électrique et protéger la liberté économique.

  • Ouvrir le marché des compteurs électriques

    Amendement proposé la loi sur la transformation et l’extension des réseaux électriques, le 30 mai 2017 et acceptée par 104 voix contre 88.
    16.035 – Transformation et extension des réseaux électriques. Loi
    Proposition individuelle Ph. Nantermod
    Loi du 23 mars 2007 sur l’approvisionnement en électricité
    Art. 17a al. 4 (nouveau)
    4 La vente, la location et l’installation des systèmes de mesure et de commande ne sont pas réservés aux exploitants de réseau.
    Développement
    S’il est nécessaire d’assurer l’installation de systèmes de mesure et de commande de nouvelle génération, rien ne justifie d’introduire un nouveau monopole en la matière.
    L’on a pu constater durant les années écoulées que le marché des compteurs électriques s’avérait très intéressant pour les distributeurs qui amortissaient plusieurs fois les appareils loués en l’espace de quelques années, au détriment des consommateurs et des investissements dans les installations électriques.
    En adoptant cet amendement, le Parlement assurera aux PME du secteur électrique de pouvoir concourir lors de l’installation de ces appareils et d’éviter de créer une rente de situation injustifiée en faveur de quelques grosses sociétés.

  • Les subventions, ces clous de cercueil des barrages

    Les subventions, ces clous de cercueil des barrages

    Chronique publiée dans Le Temps du 15 février 2017.

    Six ans après Fukushima, l’électricité est à revendre. A tel point que les marchés se trouvent en « surcapacité chronique », causée par des investissements subventionnés délirants, que l’on corrige à leur tour par des montagnes de subventions pour les électriciens qui, eux, ne tournent plus.
    En Europe, en dix ans, des centaines de milliards de francs d’impôt ont été dépensés pour augmenter la production électrique. Simultanément, les batteries de mesures destinées à réduire la consommation ont porté leurs fruits : en Suisse, on n’a pas consommé plus d’électricité en 2016 qu’en 2006.
    Pas besoin d’être diplômé d’Harvard pour comprendre le problème lorsque l’offre explose et que la demande se réduit : les prix baissent. La valeur du KWh s’est effondrée à tel point que ce qui semblait l’investissement du futur il y a encore une dizaine d’années tourne aujourd’hui à perte. A certaines heures de la journée, le prix de l’électricité est même devenu négatif.
    Avec ces tarifs ridicules, même les barrages que l’on pensait aussi solides que les montagnes qui les portent ne trouvent plus d’acheteur. Qui se souvient de 2009, où l’on parlait des 20 milliards que le Valais allait tirer de la revente des concessions hydrauliques ? Aujourd’hui, même gratuitement, on ne trouve pas de repreneur.
    Les sociétés qui distribuaient des dividendes à la pelle, demandent aujourd’hui des aides toujours plus importantes : de 120 millions de la stratégie énergétique 2050, on parle maintenant d’un demi-milliard pour la suite. Sans, elles disparaîtraient. La subvention ou la vie. Les électriciens veulent leur dose de subsides pour poursuivre une dépendance folle qui les faits mourir à petit feu.
    Pourtant, lorsque l’on produit trop, la solution est de produire moins, plutôt que soutenir artificiellement une surcapacité inutile, avec l’argent des contribuables. Et contrairement aux croyances, on ne se prépare pas à la sortie du nucléaire. Avec des prix de l’électricité quasiment souterrains, qui est encore intéressé à se risquer d’investir dans les énergies renouvelables ? Quelle industrie est incitée à économiser l’énergie ? Qui financera la liquidation des centrales ? A ce tarif, on sortira de l’hydraulique avant de fermer les centrales nucléaires. D’ailleurs, plus personne n’en veut plus vraiment.
    Des années d’interventions publiques sur le marché de l’électricité aboutissent à un résultat calamiteux. A l’image de ce que fut la surproduction laitière, l’arrosoir à  subventions entraine logiquement une baisse des prix et la faillite du secteur. Avec une nuance de taille : contrairement à l’électricité, l’Etat ne nous a jamais encouragé à économiser le lait.

  • Sociétés électriques, le dumping par les sociétés publiques ?

    Sociétés électriques, le dumping par les sociétés publiques ?

    Interpellation déposée déposée le 8 juin 2016 au Conseil national.
    Plusieurs PME actives dans le secteur du montage et des installations électriques se plaignent que des grands producteurs, distributeurs ou groupes électriques publics ou appartenant aux collectivités usent de leur position quasi-dominante pour investir le marché des installations électriques avec des pratiques pour le moins agressives, parfois en usant de prix de dumping.
    Selon l’art. 10 de l’ordonnance sur les installations à basse tension (OIBT) « les entreprises doivent affecter à la surveillance technique au moins une personne du métier à plein temps pour 20 contrôleurs/chefs monteurs-électriciens, monteurs-électriciens, électriciens de montage, apprentis ou auxiliaires occupés à des travaux d’installations ».
    Les PME font l’objet d’un contrôle poussé de la part des autorités, et respectent cette règle qui explique notamment leurs tarifs. Souvent, pour ces petites sociétés, l’homme de métier est le patron qui reçoit l’inspecteur de l’ESTI chargé de contrôler l’entreprise. Par contre, pour les plus grandes structures, il apparaît que le contrôleur ne dispose pas des listes de salaires AVS en cours.
    On peut par ailleurs être surpris de constater les ratios personnel/personne de métier annoncés par les grands groupes paraissent a priori contraires aux règles légales, par exemple :

    • E-Connect (groupe E) annonce sur son site internet 653 collaborateurs pour seulement 17 personnes de métier (dont au moins une personne à la retraite depuis plusieurs années) ;
    • Cablex (Swisscom) annonce 1000 employés pour seulement 12 personnes du métier à plein temps ;
    • Sedelec annonce 300 collaborateurs mais seulement 7 personnes de métier pour les cantons de Genève, Vaud et Neuchâtel).

    Est-ce que le Conseil fédéral a l’assurance que les contrôles effectués auprès des grands groupes sont sérieux, menés avec au moins autant d’exigence qu’auprès des PME, en s’assurant pour chaque employé que ceux-ci disposent des diplômes adaptés, sont toutes salariées de l’entreprises, et qu’ils sont effectivement en activité (sans s’arrêter aux simples déclarations statistiques des groupes), par soucis d’égalité de traitement ?

  • Nationaliser l'électricité ? Quelle idée…

    Nationaliser l'électricité ? Quelle idée…

    Publié dans le Temps du 23 avril 2016.
    Après Fukushima, les experts prévoyaient une grande pénurie électrique due à la croissance constante de la demande et la réduction de la production occasionnée par la sortie du nucléaire annoncée de toutes parts. Cinq ans plus tard, on ne manque pas d’électricité, mais on souffre d’une surproduction de masse. Lorsque l’on fait le parallèle avec l’évolution du prix du pétrole, on pourrait en tirer comme conclusion que l’exactitude des prévisions économiques est inversement proportionnelle au nombre de spécialistes qui les répandent.
    Ainsi, la consommation électrique a stagné, et même diminué, par l’effet cumulé des crises et des économies d’énergie. Les mesures interventionnistes, à coup de milliards de subventions disséminées en Europe et en Suisse, ont entraîné l’augmentation artificielle de la production électrique renouvelable, éolien et solaire, dans des proportions inespérées. Le résultat est prévisible : quand l’offre explose et la demande stagne, les prix s’effondrent à tel point que chaque kilowattheure produit par un barrage coûte en moyenne plus cher qu’il ne rapporte.
    On peut difficilement imaginer une politique plus dommageable que cet interventionnisme dans un marché libre qui fonctionnait. Non seulement nucléaire et charbon sont toujours présents, non seulement les moyens pour démanteler ces centrales sont plus que jamais manquants, mais c’est l’hydroélectricité qui est sur le point de passer l’arme à gauche. Pour couronner le tout, aux tarifs actuels, les économies d’énergie ont perdu tout leur attrait.
    Le marché électrique fonctionne comme le Tour de France des années 1990 : tous les coureurs sont dopés aux subventions. Et on se demande aujourd’hui s’il faut constituer une équipe étatique, en espérant que l’on ne sera pas la première victime de cette course folle, alors qu’il vaudrait mieux ranger le vélo.
    Face à ce modèle de l’échec des politiques économiques publiques, il se trouve encore des personnes pour proposer encore plus d’Etat, par la nationalisation des sociétés électriques. Pour nous convaincre de dépenser les milliards du contribuable, on avance peu d’arguments rationnel, mais le slogan de l’auto-approvisionnement. On évoque des groupes chinois rachetant les barrages à vil prix, à des financiers voyous bradant les turbines. Avec romantisme, on invoque les drapeaux suisses qui flotteront bientôt sur les murs de rétention. Et on feint d’ignorer que les barrages et les chutes d’eau ne sont pas délocalisables, que le courant voyage difficilement et se stocke très mal.
    Etatiser les barrages serait absurde, tout comme constituer un monopole national sur l’énergie. Les barrages seraient notre patrimoine ? Cela n’impose pas de les racheter aux frais du contribuable : personne ne s’inquiète de savoir à qui appartiennent les cathédrales ou les terrains de Lavaux. Nationaliser le courant ne garantit pas non plus un approvisionnement sûr. Au contraire, c’est spéculer sur l’électricité avec l’argent public, c’est jouer au casino avec l’argent des contribuables, c’est éponger les pertes abyssales d’Alpiq.
    Pas question pour autant de mettre l’Etat hors jeu ; l’électricité est réglementée par un corpus législatif dense. Chaque installation de production fait l’objet d’une concession définissant les droits et obligations de chacun. En cas de pénurie, la loi prévoit même un droit de réquisition. On peut définir les technologies interdites parce que trop risquées – comme le nucléaire – sans pour autant faire le travail à la place des privés, comme les collectivités ont interdit l’amiante, sans étatiser la production de ses substituts.
    Souvenons-nous de Swissair qui naviguait à perte dans un marché de sociétés publiques subventionnées. L’Etat a joué les pompiers et n’a pas récupéré le trentième de ce qu’il a dépensé pour garantir que des avions continuent à voler en Suisse. Or, avec le recul, nous savons que le marché libre a largement mieux desservi l’aéroport de Cointrin que l’argent du contribuable à Kloten. Evitons de revivre un nouveau grounding, de l’électricité cette fois.

  • Racheter les barrages et vivre un Swissair de l'électricité

    Racheter les barrages et vivre un Swissair de l'électricité

    Publié dans l’Agefi, le 16 mars 2016
    L’origine du mal
    Pour faire un mauvais jeu de mot, on pourrait dire que le débat énergétique est devenu passablement électrique. En l’espace de quelques jours, le Conseil national a décidé de subventionner la production hydro-électrique et Alpiq, groupe qui gère plus du quart de la production d’électricité de Suisse, a annoncé sa volonté de céder ses barrages aux plus offrants.
    Il n’en fallait pas plus pour que les partisans d’une économie planifiée rappellent leur attachement aux monopoles étatiques, proposent la nationalisation des infrastructures et accusent la prétendue libéralisation de tous les maux. Ce n’est pas tant qu’un socialiste comme M. le conseiller d’Etat Pierre-Yves Maillard se positionne dans ce sens qui surprend, mais plutôt qu’une cohorte d’élus prétendument libéraux le suive.
    Est-ce la libéralisation du marché de l’électricité qui a causé la gabegie actuelle ? Non. Jusqu’en 2011, les entreprises du secteur agissaient comme des offreurs raisonnables : elles investissaient dans des projets de qualité, rentables, avec la prudence que l’on peut attendre de sociétés de cette taille. Cette année-là, suite à la catastrophe nucléaire de Fukushima, les Etats de tout le continent se sont alors mêlés de production électrique. Au lieu d’interdire simplement l’atome, par crainte de manquer de courant, les élus se sont mis en tête de subventionner massivement les énergies renouvelables, à coup de dizaines de milliards d’euros par année.
    Le résultat de cette politique était prévisible. Plutôt que de choisir des projets rentables, les compagnies ont participé à la création d’une bulle électrique. Dès lors que l’Etat finançait les investissements, la production a explosé, sans tenir compte des besoins, avec pour effet un effondrement du prix de l’électricité qui rend les barrages déficitaires et pousse leurs propriétaires à mendier à leur tour les subventions publiques. Des projets intelligents comme le rehaussement du Grimsel, obtenu de haute lutte après des années de négociation, ont simplement été abandonnés, pour les remplacer par des infrastructures déficitaires et financées par des taxes.
    A l’heure de la transition énergétique, on peut difficilement imaginer une politique aussi absurde : non seulement les barrages ont perdu toute leur valeur, mais avec un prix de l’électricité ridiculement bas, on a supprimé tout incitatif à économiser le courant.
    Le problème ne vient donc pas de la libéralisation, mais d’un interventionnisme aussi massif que malvenu, avec ses milliards de subventions, face auquel les tenants du tout à l’Etat proposent encore davantage de subventions. Aujourd’hui, le marché électrique ressemble au Tour de France où, plutôt que de lutter contre le dopage, chacun augmente sa dose en espérant ne pas être le premier à en mourir.
    Racheter les barrages et vivre un Swissair de l’électricité
    Déficitaires, ces installations sont en vente parce que leurs propriétaires ne comptent plus en tirer de bénéfices. Or, il n’existe aucun devoir de l’Etat de supporter les risques liés à l’exploitation des barrages en les rachetant.
    Certains affirment que la souveraineté nationale est en jeu. Le mot fait peur, mais son usage est abusif. La Suisse, pas plus que les autres pays du continent, ne vit en autarcie, et c’est tant mieux : comme disait Bastiat, si ce ne sont pas les biens qui traversent les frontières, ce sont les soldats.
    La prise de participation de sociétés privées, même étrangères, n’est pas forcément une mauvaise affaire. Non seulement les infrastructures en question ne peuvent pas être délocalisées, mais toutes les conditions relatives à l’exploitation sont fixées par notre législation en matière d’environnement, d’assurances, d’entretien, de sécurité, etc. Ce n’est pas une souveraineté électrique fantasmée que l’on risque de perdre, mais uniquement les risques liés à l’exploitation des barrages, qui se traduisent actuellement par d’importantes pertes.
    Faut-il, comme le propose M. Maillard, réintroduire un monopole public, et fixer les prix dans la loi ? Cette intervention sur les prix, on la vit maintenant, avec les subventions massives et leur funeste conséquence. Des prix élevés sont intéressants pour les producteurs, mais mauvais pour les consommateurs. L’Etat est-il plus à même que le marché pour trouver le juste prix ? Poser la question, c’est y répondre.
    Aujourd’hui, les petits consommateurs ne peuvent pas bénéficier d’un marché électrique libre qui leur permettrait de profiter des prix bas. Le marché fonctionnait jusqu’à l’introduction d’une politique énergétique européenne interventionniste, il faut faire machine arrière.
    A contrario, racheter les barrages, c’est demander à l’Etat de se charger d’une tâche qu’il ne maîtrise pas pour garder quelques infrastructures en mains suisses, qui finiront probablement et malgré tout vendues aux spécialistes du secteur. Tout cela au nom d’un patriotisme économique éculé. Nous connaîtrons alors un Swissair, de l’électricité cette fois.

  • Sociétés électriques : pourquoi refuser de les subventionner ?

    Sociétés électriques : pourquoi refuser de les subventionner ?

    Depuis la catastrophe nucléaire de Fukushima, le marché de l’électricité est complètement perturbé par un nouveau tsunami, de subventions cette fois-ci. Dans l’idée d’anticiper la sortie du nucléaire, les Etats européens, et l’Allemagne en tête, se sont mis à financer massivement la création de centrales électriques renouvelables (éolien et solaire) et même certaines centrales moins propres, au charbon, au gaz.
    Cette politique a mené à une augmentation de la production électrique, et, comme dans tout marché, si l’offre augmente, le prix baisse. Baisse tellement que l’électricité ne vaut plus rien, ou presque.
    Or, avec un prix de l’électricité pareil, la rentabilité des barrages s’est effondrée, au point que l’hydroélectricité est devenue carrément déficitaire.
    Face à cette situation, la solution adoptée par le Conseil national est absurde : subventionner les producteurs d’électricité. La source de tous les maux des producteurs d’électricité est la multiplication des subventions publiques, et la solution proposée est d’ajouter encore un peu de subventions à ce système. Jeter de l’huile sur le feu.
    Alpiq, EOS et les autres, ces compagnies électriques qui ont gagné de l’argent pendant des décennies en nous vendant de l’électricité. Aujourd’hui, en raison d’un prix de l’énergie trop bas, le contribuable doit financer les pertes.
    Le remède proposé est pire que le mal dont l’on parle. Chacun s’accorde à dire que le marché se régulera lorsque nous sortirons de la logique de subventions, mais tous proposent de s’y enfoncer encore un peu davantage. Et non seulement chaque franc de subvention fait pression à la baisse sur le prix de l’électricité, mais rend toujours plus difficile à terme les moyens de sortir de cette logique destructrice.
    Il n’y a pas de salut dans les subventions. Certes, les sociétés électriques souffrent et bénéficieront certainement d’un bol d’air sympathique temporairement. Mais il n’existe aucune garantie que le prix de l’électricité retrouvera à terme un prix permettant aux barrages d’atteindre à nouveau le seuil de rentabilité. Certes, plusieurs indices laissent penser que le prix pourrait augmenter, mais d’autres, tout aussi convaincants, soutiennent le contraire. Or, les diseuses de bonne aventure en la matière se trompent souvent. Personne n’aurait anticipé un prix du baril du pétrole aux niveaux actuels, ceux qui affirment connaître le prix de l’électricité en 2025 spéculent sur du vent.
    Le choix de ne pas subventionner est difficile, mais juste. Il revient à laisser la responsabilité aux sociétés électriques, celle de perdre, et celle de gagner.
    Mais alors, quel avenir pour nos barrages ? Non, ils ne ne vont pas disparaître sans subvention, il est temps d’arrêter de dire n’importe quoi. Toutes les sociétés électriques qui réclament des subventions considèrent que le prix de l’électricité va remonter dans les dix ans et que les barrages reprendront de la valeur à ce moment-là. Alors de deux choses l’une.
    – Soit ces sociétés nous enfument ne pensent pas que l’électricité va reprendre de la valeur. Dans ce cas, ces subventions sont jetées à la poubelle, 1.2 milliards de dépensés pour rien, parce que les barrages resteront déficitaires et l’on ne produira pas de l’électricité à perte à long terme. 
    – Soit ces entreprises croient à un retour d’un prix juste. Dans ce cas, c’est entreprises peuvent se débrouiller pour financer leurs investissements, cela d’autant plus qu’elles appartiennent aux cantons et villes du plateau qui ont largement les moyens de financer ces dépenses. Relevons au passage que personne ne parle  de partager le bénéfice lorsque les barrages seront à nouveau rentable, ou de rembourser les subventions. Privatiser les bénéfices mais socialiser les pertes, un « business model » intéressant pour l’entreprise, moins rentable pour la collectivité. 
    En d’autres termes, si les barrages ont un avenir, ces entreprises investiront. S’ils n’en ont pas, ce que l’on ne peut pas exclure malheureusement, ce n’est pas aux contribuables de payer l’addition pour maintenir artificiellement des infrastructures auxquelles même la branche électrique ne croirait plus.
    Last but not least, subventionner la production d’électricité, alors que l’on cherche à réduire la consommation, est certainement la plus grande aberration écologique imaginable. Celles et ceux qui ont fait l’effort de réduire leur consommation financeront désormais par les taxes la consommation de ceux qui gaspillent.
    En fin de compte, la meilleure solution, à mes yeux, est de revenir aux règles du marché. Arrêter les subventions, et pour cela il faut qu’un acteur tire enfin le frein de cette politique énergétique folle européenne qui, au lieu de nous sortir du nucléaire, rend les énergies renouvelables historiques déficitaires. La Suisse aurait pu être le premier de ces acteurs, il sera malheureusement un pays de plus à creuser encore un peu plus davantage le puits sans fond des subventions publiques.