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0.4% pour la solidarité entre les générations

Philippe Nantermod

Philippe Nantermod

0.4% pour la solidarité entre les générations

L’Assurance invalidité se retrouve à nouveau sous le feu des projecteurs électoraux, et il est presque certain que ce n’est pas la dernière fois. La vieille institution bien utile, parfois décriée, constitue un peu notre sécu et son trou, en langage hexagonal. Déficitaire, des mesures drastiques ont déjà été entreprises : la 5e révision de l’AI a passé le cap du référendum et la 6e est dans le collimateur. On peut déjà affirmer que la cinquième a rempli son rôle puisque le nombre de nouvelles rentes annuelles s’est stabilisé. Cette première étape essentielle dans le processus de sauvetage de l’institution est suivie maintenant par la question qui fâche : qui doit reboucher le trou ?
Aujourd’hui, la baignoire qui fuit un peu moins est dangereusement vide. 13 milliards de francs de dettes ont été accumulés au fil des années et grèvent directement le fonds AVS ; les deux institutions ont été créées ensembles et sont juridiquement liées.
Qu’on le veuille ou non, ces milliards devront être remboursés. Si rien n’était entrepris fait, l’argent serait inévitablement pris sur le ménage courant AVS/AI, c’est à dire sur les cotisations paritaires des citoyens qui travaillent. En tant que jeune permettez moi de râler. En matière d’assurances sociales, ma génération est celle qui hérite des plus mauvais comptes de l’Histoire et d’un défi démographique à vous empêcher de dormir. AVS, LPP, Assurance chômage, LAMal, toutes les institutions sociales de Suisse comptent aujourd’hui sur des actifs riches et sympas pour payer les pots cassés, et il est exclu de répudier la succession.
La solidarité a un prix, prix que les générations qui n’ont pas connu les trente glorieuses s’apprêtent à payer. Il serait profondément injuste que les actifs passent seuls à la caisse pour la dette AI. Le gouffre a notamment été creusé pendant la décennie écoulée et chacun doit mettre la main au porte-monnaie. C’est ce que propose le Conseil fédéral avec un financement complémentaire via la TVA. Passer de 7.6% à 8% de TVA pour quatre ans, c’est s’assurer que les actifs et les rentiers contribuent ensembles au renflouement de l’un des comptes les plus rouges de notre Etat. Qui s’oppose à ce financement complémentaire accepte simplement de laisser les générations actives se charger de payer seules la note.
De leur côté, les opposants au financement complémentaire font dans le simplisme : « il y a qu’à » tailler dans les prestations et la dette s’envolera comme par magie. Je fais partie de ces esprits chagrins qui voient mal l’AI devenir une entreprises super rentable, malgré les diverses révisions à venir. Tâchons déjà de réparer l’évier qui fuit avant de le transformer en puits de pétrole.
Comprenons plutôt que, même si on gelait les nouvelles rentes AI, la dette faramineuse existerait toujours et des solutions de financement devraient quand même être trouvées. C’est notre défi aujourd’hui : soit on attend et on laisse l’AVS sombrer avec l’AI, soit on prend les devants et on règle dès maintenant ce problème, histoire de ne pas laisser toutes les casseroles percées aux jeunes générations. C’est une question de solidarité intergénérationnelle et c’est pour cela que je voterai OUI le 27 septembre prochain.

Commentaires

2 Comments

  1. Hem, disons que l’objectif actuel n’est pas à augmenter le nombre de rentes, mais plutôt à le diminuer.
    Les 4e, 5e et la future 6e révision de l’AI ont pour objectif de réduire les dépenses d’une assurance sociale devenue complètement déficitaire.
    L’augmentation de 0.4%, qui ne va pas être facile à obtenir, a pour but de renflouer le trou de l’AI et non pas de permettre de nouvelles prestations ou l’extension des actuelles.
    Question de priorité. Que proposez-vous ? Augmenter la TVA pour augmenter le nombre le nouvelles rentes ?

  2. Monsieur Nantermod,
    Que pensez-vous de cette citation ?
    « Le taux de nouvelles rentes est de 0,34 % pour les Suisses. Parmi les étrangers, ceux qui présentent le taux le plus élevé (0,93 %) sont les Turcs ; les migrants venant d’ex-Yougoslavie sont deuxièmes avec 0,77 %, tandis que les travailleurs étrangers « classiques » – Italiens, Espagnols et Portugais – ont un taux qui se situe entre 0,42 et 0,57 %. Les autres nationalités citées se situent au-dessous du chiffre valable pour la population suisse. Les Allemands (0,15 %) et les Britanniques (0,13 %) ont des taux très bas, ce qui peut s’expliquer par le fait qu’ils occupent en Suisse des emplois à qualification plutôt élevée, tandis que les migrants provenant des pays d’émigration classiques sont généralement moins qualifiés et que ceux venant de l’ex-Yougoslavie et de Turquie occupent des emplois à qualification très basse, ce qui influe considérablement sur le risque d’invalidité. Les taux très bas du « Reste de l’Europe » et du « Reste du monde » s’expliquent notamment par le fait que les conditions de droit sont plus difficilement remplies pour ces nationalités et que les rentes AI acquises en Suisse ne peuvent souvent pas être exportées dans le pays d’origine.
    La répartition des nouvelles rentes (tableau 6.4.5) montre que les chiffres très élevés des migrants venant de Turquie ou de l’ex-Yougoslavie reposent souvent sur une très forte incidence des troubles psychiques. La probabilité pour qu’une personne venant de ces pays obtienne une rente pour raisons psychiques est égale – voire plus grande – à l’incidence dans la population totale. »
    Source: http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/news/publikationen.Document.112659.pdf (page 27)
    Comment expliquez-vous que, de l’avis de cet office fédéral, les « conditions de droit sont plus difficilement remplies pour ces nationalités » (pour résumer les Africains). Y a-t-il discrimination (des Africains) ou discrimination positive (des personnes issues de l’Ex-Yougoslavie). ??
    En outre, comme sur le forum d’infrarouge, il y a un certain mixte entre diverses notions de droit, puis-je rappeler ici que pour toucher une rente, il faut que l’assuré ait cotisé une année entière AVANT la survenance de l’invalidité (art. 36 LAI), ce qui exclut de facto de cette assurance l’ensemble des stress post-traumatiques diagnostiqués chez les personnes provenant d’une zone de guerre (Bosnie, Kosovo, etc).
    Par exemple:
    http://admin.fr.ch/shared/data/pdf/tc/admin/2009/5s_06_256_02_10_08.pdf
    Or il semble que cette clause est appliquée avec beaucoup plus de sévérité pour les ressortissants africains que pour les ressortissants de Turquie ou de l’Ex-Yougoslavie, ne le pensez-vous pas ?
    La question est de savoir s’il ne faudrait dès lors pas augmenter plus drastiquement la TVA (ou d’autres impôts) et éliminer définitivement cette discrimination ou corriger un facteur culturel qui rendrait l’administration plus « indulgente » pour nos voisins européens…. (quitte à révoquer certaines rentes)
    Par contre, est autre la question de savoir si nos politiciens pourront véritablement défendre à long terme un système dont « La probabilité pour qu’une personne venant de ces pays [Turquie ou Ex-Yougolsavie) obtienne une rente pour raisons psychiques est égale – voire plus grande – à l’incidence dans la population totale. » ??


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