Départ de Moritz Leuenberger : tant d’années pour si peu de résultats

Communiqué de presse des jeunes libéraux-radicaux suisses du 9 juillet 2010
Après 15 ans passés au gouvernement, après avoir siégé avec pas moins de 16 Conseillers fédéraux différents, Moritz Leuenberger laisse à son futur successeur un département dont les chantiers stagnent, voire reculent. Les jeunes libéraux-radicaux suisses émettent le vœu que les prochains Conseillers fédéraux restent moins longtemps en place, pour une action plus efficace. Le départ de Moritz Leuenberger constitue de surcroît une nouvelle occasion à ne pas rater de rajeunir le Conseil fédéral.
Moritz Leuenberger laisse le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC) dans une situation pour le moins malheureuse. Il est regrettable qu’il eut fallu attendre 15 ans pour que le ministre songe à laisser la place à une personnalité plus motivée.
En matière de communications, les Suisses se sont vu confirmer encore cette semaine que les tarifs des télécommunications étaient les plus élevés d’Europe. De même, le dossier de la privatisation de Swisscom est enlisé et illustre bien le laisser-aller d’un office fédéral incapable de choisir une direction et de fixer des règles du jeu clair. L’affaire de la fusion Orange – Sunrise avaient été encore là pour le montrer.
Les transports publics ne vont pas mieux. L’absence complète de vision en matière de trafic ferroviaire du DETEC a pour conséquence une perte de la qualité du service sans pour autant proposer de projets d’avenir. Les trains suisses sont lents, bondés et chers. Ici aussi, le Conseiller fédéral démissionnaire laisse un énorme travail à son successeur.
Last but not least, le dossier énergétique ne bouge pas. Alors que tous les experts s’accordent à dire que l’approvisionnement énergétique de la Suisse est en danger, le Conseiller fédéral n’a pas rempli son rôle de chef de département en n’apportant aucune piste de solution pour rénover les centrales nucléaires ou construire massivement des projets énergétiques importants.
Quinze ans au Conseil fédéral pour si peu de résultats. Une nouvelle expérience Leuenberger signifierait une nouvelle dégradation des infrastructures et conduirait à la Suisse dans une impasse gravissime. Les jlrs souhaitent que les futurs Conseillers fédéraux restent moins longtemps, deux législatures au plus, et jouent un vrai rôle de leader dans leurs domaines.

Ce que le peuple fait, seul le peuple peut le défaire

Mercredi 23 juin 2010, le Conseil de l’Europe a demandé à la Suisse de suspendre l’application de l’initiative sur les minarets. Cette décision serait assez anodine si les représentants qu’y compte la Suisse n’avaient pas eux aussi voté en faveur de cette résolution. Ces députés, issus et élus par le Conseil national, représentent l’Etat, ses institutions et surtout la population. C’est surprenant, mais les cinq représentants de la Suisse au Conseil de l’Europe, des socialistes aux UDC, ont soutenu un texte demandant de suspendre une décision du peuple.
Mais qu’est-ce qui a bien pu leur passer par la tête ? J’ai été déçu le 29 novembre 2009, très déçu. Je m’attendais à un rejet massif, à un vote clair en faveur de la liberté religieuse et de l’égalité de traitement. Il n’en a rien été et j’ai perdu avec la minorité. Il est temps d’admettre que le fameux vote n’était pas qu’une question de droit des constructions, mais mettait en exergue des craintes enfouies au plus profonds de la conscience collective.
Il n’est pas de la compétence de cinq Conseillers nationaux de jouer la courroie de transmission des positions helvétiques de cette manière. Je suis effaré de voir à quel point nos représentants au Conseil de l’Europe n’ont pas saisi ce qui s’est passé le fameux 29 novembre 2009. Non, ce n’était pas un vote entaché d’irrégularités, ni un coup de gueule spontané. Ce que le vote sur les minarets montre est bien plus conséquemment ancré dans l’opinion publique. Un vote non contraignant d’une autorité internationale n’y changera rien, et les multiples interventions déposées par la suite dans les pays européens le montrent bien : le concept même de laïcité a radicalement changé sur le continent.
Nos cinq représentants au Conseil de l’Europe ont la mémoire courte : ce sont les mêmes qui ont estimé l’initiative valide et l’ont soumise au peuple. Ils ont ensuite un peu oublié de mener une campagne, persuadés comme je l’étais que jamais, au grand jamais, le peuple helvète pourrait prendre une décision pareille.
Et pourtant le peuple a voté. Le vote sur les minarets n’était pas un gag, ce n’était pas un sondage d’opinion. Non, il est bien réel. Le peuple a pris une décision et a voulu insérer un article – sans doute extrémiste – dans notre Constitution. Les élites politiques, élues par ce peuple, doivent l’accepter et le respecter, ou alors demander au peuple de modifier à nouveau la Constitution, en récoltant les signatures ou des voix au Parlement. En droit, on appelle cela le parallélisme des formes : ce que le peuple fait, seul le peuple peut le défaire.
Nos cinq représentants du Conseil de l’Europe laissent entendre que la démocratie peut non seulement fonctionner sans le peuple, mais, pire, contre lui. Par ce genre de comportement, ces élus ne font qu’accentuer le clash entre une classe politique et une classe populaire, distinction qui se renforce malheureusement au fil des ans, au fil des gestes de défiance de parts et d’autres. Chers parlementaires, vous ne vous en êtes peut-être pas rendu compte, mais il y a une majorité en Suisse qui considère que nous avons un problème avec l’Islam. Que ce problème soit irrationnel, exagéré ou contraire au droit de l’homme n’y changera rien. Ce sentiment restera toujours bien présent tant que l’on n’aura pas admis qu’un problème, même uniquement dans l’esprit des citoyens, reste un problème. Le nier ne fera jamais que le renforcer.
Cette position montre que notre démocratie a du plomb dans l’aile. Pas parce que le peuple a pris une position qui n’est certainement pas la plus réfléchie que nous n’ayons jamais prise, mais parce que certains élus oublient l’essence même de la démocratie : la souveraineté populaire.