30 000 jeunes à l'aide sociale, on fait quoi?

44% des bénéficiaires de l’aide sociale ont moins de 25 ans. Le professeur bernois Robert Fluder, auteur de l’étude qui dévoile ce chiffre inquiétant, explique ce résultat par le phénomène du «cooling out», soit le fait de se mettre au frais. En d’autres termes, le problème vient de jeunes qui, à un moment ou à un autre, décrochent de l’école obligatoire ou de leur formation professionnelle pour bénéficier des diverses mesures d’intégration et autres plans sociaux (semestres de motivation, chômage, etc.). Curieusement, de nombreux jeunes citoyens ont l’air de préférer l’assistanat au travail, avec toutes les conséquences négatives que cela comporte.
Comment atterrit-on à l’aide sociale quand on a 18 ans? Selon l’étude précitée, l’absence de formation explique l’essentiel des problèmes. Notre Etat offre pourtant un panel de formations publiques de qualité et de plus en plus large. Des HES aux EPF en passant par les EDD, ou les CFC, les acronymes désignant des filières publiques se bousculent. On serait en droit de penser que les jeunes de 2011 ont moins de problèmes de formation que les générations précédentes. Et pourtant, non. En Suisse, 30 000 jeunes de moins de 25 ans touchent l’aide sociale. Parmi ces jeunes, un tiers n’a carrément aucune activité et n’est pourtant pas à la recherche d’un emploi. A 20 ans, ça promet!
A mon avis, le problème principal réside dans notre conception de l’intégration.
Trop souvent, nos oeuvres sociales considèrent que la société doit intégrer le jeune qui a décroché. Je n’y crois pas. S’intégrer est avant tout l’effort de l’individu qui veut faire partie d’une société. Comme l’étranger doit faire des efforts d’insertion, le jeune pudiquement déclaré «en rupture» est responsable de son destin et doit être appelé à faire le premier pas, à faire preuve d’efforts dans le processus d’intégration. Sans nier l’utilité des mesures publiques, il s’agit de fixer l’ordre de priorités.
En mars, le Grand Conseil débattra de la nouvelle Loi sur l’aide sociale et l’intégration et, à cette occasion, décidera du sort à donner à ma proposition en la matière. Pour mémoire, j’ai déposé une initiative parlementaire réclamant que toute personne en âge de travailler, apte au travail et sans enfant à charge soit astreinte, dès le premier jours d’aide sociale, à travailler au service de la collectivité. Un petit boulot, à plein temps, pendant un mois, pour réapprendre les valeurs du travail, retrouver l’habitude de se lever le matin, d’obéir à une hiérarchie ou de travailler en équipe.
Là où la mesure a été expérimentée, elle s’est avérée si efficace que presque tous les cantons alémaniques s’y mettent.
Pas de prestation publique sans contreprestation équivalente, c’est valoriser l’effort et redonner un sens au mérite.
L’Etat l’a trop souvent oublié, il n’est pas trop tard pour y remédier.
Publié dans le Nouvelliste, le 17 février 2011