Auteur/autrice : Philippe Nantermod

  • LAT : le PLR stupéfait du retournement de veste du PDC

    LAT : le PLR stupéfait du retournement de veste du PDC

    Communiqué de presse du PLR VS, du 12 décembre 2013

    Le Grand Conseil valaisan a adopté en première lecture une loi d’application de la LAT qui prévoit le transfert de toutes les compétences qui comptent aux administrations cantonales et fédérales. Alors que les partis de droite valaisans s’étaient opposés à la nouvelle LAT, il est stupéfiant de constater que le PDC soutienne aujourd’hui une loi qui affaiblit considérablement les compétences du souverain en matière d’aménagement du territoire.
    Le projet adopté prévoit que le plan directeur cantonal ne sera plus adopté par le Grand Conseil, mais par l’exécutif. Or, ce plan est le seul qui compte vraiment. Homologué par le Conseil fédéral, il doit prévoir le développement du territoire cantonal et inclure, selon la nouvelle ordonnance fédérale, les mandats de réduire les zones à bâtir. Avec la nouvelle loi, le Service cantonal n’aura de compte à rendre plus qu’à l’autorité fédérale.
    Le Grand Conseil se prive ainsi volontairement de ses prérogatives au profit d’un « concept du développement territorial » dont la valeur juridique est nulle, qui n’est pas prévu par le droit fédéral et dont le contenu se limitera vraisemblablement à un inventaire de bonnes intentions inutiles.
    Le PLR souhaitait encore soumettre le plan directeur au référendum populaire facultatif. Là encore, la majorité a estimé qu’il appartenait à l’administration plutôt qu’au peuple de définir le développement territorial. Ce choix est plus que regrettable et dénote un manque de respect du choix des citoyens valaisans qui avaient massivement rejeté la LAT en mars 2013.
    Le PLR est déçu de ce grave manque de cohérence du PDC. Entre le 3 mars et le 12 décembre, seulement 9 mois se sont écoulés, mais ils ont suffi à permettre un changement intégral de position de l’ancien parti majoritaire.
    En mars, le PLR avait refusé la révision de la LAT sur le plan fédéral et cantonal. Aujourd’hui encore, les libéraux-radicaux s’opposent à ces révisions législatives néfastes, et s’engageront encore, en deuxième lecture, pour combattre un projet qui fait la part belle à la bureaucratie fédérale plutôt qu’au fédéralisme et à la démocratie.

  • Le pernicieux démantèlement du fédéralisme

    Le pernicieux démantèlement du fédéralisme

    Publié dans le Nouvelliste le 10 décembre 2013
    Lors des débats sur la révision de la LAT, il a été répété que les cantons n’avaient pas à craindre pour leurs prérogatives. La peur de voir le fédéralisme s’éroder ne servait soi-disant qu’à soutenir un développement territorial chaotique. La révision de l’ordonnance de la LAT montre aujourd’hui que nos inquiétudes étaient totalement justifiées.
    On assiste à une tendance lourde de transfert de dispositions de la loi et des plans d’affectation dans le plan directeur cantonal. Quiconque méconnaît le millefeuille indigeste de l’aménagement du territoire n’en perçoit probablement pas les conséquences, pourtant bien réelles.
    La loi cantonale sur l’aménagement du territoire est adoptée par le Grand Conseil et soumise au référendum facultatif. Les plans d’affectation relèvent de l’autonomie communale. A contrario, le plan directeur cantonal, arrêté par le canton, est homologué par le Conseil fédéral qui exerce par là une véritable surveillance soutenue par maintes directives et recommandations.
    En d’autres termes, chaque transfert d’éléments de la première catégorie d’actes juridiques vers la seconde revient à renforcer un peu davantage le contrôle fédéral sur l’aménagement du territoire.
    Selon l’Office fédéral, le plan directeur doit devenir toujours plus complet. Il s’apparente de plus en plus à un grand plan d’affectation à l’échelle du canton, incluant l’emplacement de tous les grands projets (centres commerciaux, remontées mécaniques, infrastructures importantes, etc.) jusque dans des détails qui relèvent aujourd’hui de la liberté d’appréciation des communes. L’OAT révisée prévoit que le plan directeur inclut des mandats pour réduire les zones à bâtir et le développement urbain se verra concrétisé directement dans ce grand machin cantonal.
    En bref, la marge de manœuvre des Etats fédérés se réduit comme peau de chagrin. L’Office fédéral devient petit à petit une véritable autorité de surveillance des cantons, en violation crasse de la Constitution fédérale.
    Cette évolution inquiète. Les afficionados du coloriage des cartes de la Suisse s’en satisfont certainement, les communes et autorités politiques élues un peu moins. On peut légitimement craindre une uniformisation de l’aménagement de notre sol qui assimile le développement de la Bahnhofstrasse de Zurich avec celui de la rue du Village de Champéry.
    Pour couronner le tout, cette semaine, le Grand Conseil devra adopter la révision de la LAT cantonale. Tenez-vous bien. Il est prévu que le plan directeur ne sera plus adopté par le parlement. Mis en parallèle avec les évolutions du droit fédéral, l’aménagement de notre territoire passera ainsi entièrement dans les mains de l’administration cantonale et fédérale, autrement dit sans aucun contrôle du peuple. Si l’on voulait faire du fédéralisme une coquille vide destinées à alimenter les discours de 1er août, on ne s’y prendrait pas autrement.

  • Négociations franco-suisse : arrêtons les frais

    Négociations franco-suisse : arrêtons les frais

    Chronique publiée dans le Nouvelliste du 26 novembre 2013

    Feuilleton trop longtemps programmé et repoussé, la convention franco-suisse sur les successions ne passera probablement pas le cap des Chambres fédérales. Pourtant, on apprend que les autorités fédérales se remettent déjà à la table des négociations.
    On nous annonce des discussions « croisées », un tiens contre un donné. La lecture des dossiers brûlants montre une asymétrie qui jette le doute sur l’opportunité même d’entamer la discussion.
    Contrairement à ce qu’affirme Mme Widmer-Schlumpf, le règlement du passé des désignés fraudeurs du fisc ne sert pas nos intérêts, pas plus que l’adoption de nouvelles règles visant à livrer des données personnelles sur simple demande de Bercy, ni l’introduction de nouvelles dispositions successorales, forcément en faveur de la France.
    En réalité, si l’on met de côté la passion toute diplomatique des petits fours, la Suisse n’a aucun intérêt propre à lâcher gratuitement sur des questions aussi centrales que le secret bancaire. Et pour nous y pousser, encore faudrait-il nous offrir des contreparties intéressantes. Or, à ce jour, seul le règlement du différent fiscal sur l’aéroport de Bâle-Mulhouse nous sert. C’est peu. Trop peu pour tout donner en échange.
    Certes, rien n’est encore sorti du côté de Berne, on est toutefois en droit de craindre de nouvelles concessions à sens unique, dans le seul but d’adopter des règles plus modernes, plus belles, plus juridiques. Le droit pour le droit, et l’Homme à la poubelle.
    Après le rejet de l’EEE, le Conseil fédéral a longuement travaillé à la conclusion des fameux accords bilatéraux. Malgré tous les défauts qu’on pouvait leur trouver, ils étaient équilibrés, offrant aux parties les mêmes droits et devoirs et excluant la reprise automatique du droit étranger. Ces deux paquets d’accords reflètent ce que notre diplomatie fait de mieux.
    Les temps ont bien changé. Les négociations ne sont plus dans les mains des affaires étrangères ; elles ont été transmises au département des finances. On entend nos autorités se féliciter d’obtenir le statut d’observateur et de participer aux grands raouts sur la lutte contre l’évasion fiscale, leitmotiv pseudo-moral dont le seul but est de remplir les caisses d’Etats incontinents. Je me fiche de savoir que la Suisse aie voix au chapitre, seule, au milieu des vautours. Peu importe les strapontins qu’on nous concède : quel intérêt d’être l’invité d’un procès dont le jugement est écrit à l’avance ? Comme accusé, ne vaut-il pas mieux se taire que payer très cher le droit à la parole face à un jury déjà convaincu de notre culpabilité ?
    Plutôt que défendre les positions Suisses auprès de nos homologues étrangers, les autorités fédérales s’évertuent à nous convaincre du bien-fondé des demandes étrangères. En inversant les rôles, c’est la Suisse qui perd à long terme tout ce qu’elle a mis tant de temps à obtenir.

  • Densification : pour une législation adaptée

    Densification : pour une législation adaptée

    Motion déposée le 13 novembre 2013

    La nouvelle LAT impose une densification de l’espace bâti. Si le Valais est réticent à construire des tours dans les zones rurales, la densification en ville ne suscite pour ainsi dire pas de débats, notamment au regard de la croissance démographique importante de notre canton.
    Il s’avère que la loi cantonale sur les routes prévoit un traitement différent concernant les alignements entre les routes communales et les routes cantonales. Or, au sein des agglomérations, une telle distinction n’a souvent pas de sens, mais impose parfois une distance entre bâtiments qui empêche une utilisation rationnelle du sol.
    Au vu des possibilités de réduire les nuisances des routes cantonales dans les villes par un choix de revêtement adapté ou par des limitations de vitesse, le Conseil d’Etat est invité à proposer une modification de la loi sur les routes permettant des dérogations aux distances similaires pour les routes cantonales que pour les routes communales, afin de permettre une meilleure densification des villes valaisannes là où les autorités le jugent nécessaires.

  • La BNS est-elle uniquement alémanique ?

    La BNS est-elle uniquement alémanique ?

    Postulat déposé le 13 novembre 2013

    Le site internet de la Banque nationale suisse est intégralement traduit en français. Intégralement ? Non. Une rubrique résiste toujours au plurilinguisme cher à la Suisse : la page concernant les offres d’emploi.
    Après avoir contacté le webmaster de la banque centrale, il s’avère que les postes disponibles ne sont publiés que dans la langue de Goethe. De là à penser que nos amis d’outre-Sarine bénéficient de la priorité à l’embauche, il n’y a qu’un pas.
    Le Conseil d’Etat est invité dès lors à intervenir auprès de la Banque nationale suisse, dont le canton du Valais est actionnaire, pour s’assurer qu’aucune discrimination linguistique ne pénalise les candidats francophones et pour que les offres d’emploi soient publiées dans les trois langues officielles.

  • Allocations de formation : pour un système plus juste et plus solidaire

    Allocations de formation : pour un système plus juste et plus solidaire

    Motion déposée le 13 novembre 2013.

    Lors de la session de novembre 2010, le Grand Conseil a modifié sa loi sur les allocations de formation, remplaçant la plupart des prêts d’honneur par des bourses non remboursables. Au vu du budget 2014, il s’avère que ce mécanisme, pourtant rejeté par une grande partie du parlement, ne s’avère pas pérenne d’un point de vue budgétaire.
    Actuellement, l’octroi ou le refus d’une aide publique dépend de la situation familiale de l’intéressé. Ce principe – au demeurant juste – découle de l’art. 277 al. 2 du Code civil suisse qui prévoit que, si, à sa majorité, l’enfant n’a pas encore de formation appropriée, les père et mère doivent, dans la mesure où les circonstances permettent de l’exiger d’eux, subvenir à son entretien jusqu’à ce qu’il ait acquis une telle formation, pour autant qu’elle soit achevée dans les délais normaux. Si les circonstances ne permettent pas d’exiger cet entretien parental, l’Etat intervient.
    S’il ne fait aucun pli que la capacité économique familiale conditionne l’octroi d’une aide publique, c’est la capacité économique après les études qui doit décider du remboursement et de sa proportion.
    Aussi, nous demandons au Conseil d’Etat de proposer une modification de la Loi sur les allocations de formation prévoyant que les aides publiques soient accordées sans distinction entre « prêts » et « bourses » et que le principe du remboursement et sa proportion soit fixé sur la base de la capacité économique du bénéficiaire, une fois les études achevées, selon un mécanisme social de remboursement, au pro rata du revenu durant une période déterminée à après la fin des études.
    De plus, pour répondre à l’augmentation croissante des besoins de financement des études, il doit être fixé comme principe dans la loi que tout montant remboursé par un ancien bénéficiaire doit servir exclusivement au financement des études. Il s’agit là d’un principe de solidarité bienvenu entre ceux qui ont bénéficié d’une aide publique qui leur a permis une ascension sociale et ceux qui en ont aujourd’hui besoin. A terme, une telle mesure devra même permettre d’élargir l’assiette des bénéficiaires potentiels et démocratiser encore un peu plus l’accès aux études.

  • Stop aux retraites privilégiées pour les Conseillers d'Etat

    Stop aux retraites privilégiées pour les Conseillers d'Etat

    Chronique publié dans le Nouvelliste, le 12 novembre 2013
    A priori anecdotique, le Grand Conseil votera cette semaine une révision du régime de retraite des futurs Conseillers d’Etat. On se souvient du départ de Ruth Metzler et de ses 400 milliers de francs de rente annuelle, on se rappelle l’initiative Minder et son interdiction des parachutes dorés. Certes, nous ne parlons pas des mêmes montants, mais le principe est le même.
    La révision proposée réduit le nombre d’années de cotisations : après huit ans passés au gouvernement, contre douze actuellement, ses membres toucheront une pension dès 60 ans. Quelle que soit la prestation de libre passage apportée, la rente sera complète. Un âge de la retraite anticipé, un système de primauté des prestations, le mécanisme est inégalitaire au possible.
    Loin de moi l’idée de considérer que l’exercice éprouvant du pouvoir ne mérite pas un traitement digne qui permette aux élus de vivre convenablement. Je ne m’oppose pas, au besoin, à l’idée de reparler du salaire des membres du Conseil d’Etat. Le malaise est cependant réel. Lors de la réforme et de la recapitalisation des caisses de pension du personnel de l’Etat, les cinq chefs de département ont vanté en chœur les mérites du nouveau système par capitalisation. Terminées les retraites déconnectées de la réalité des cotisations, finis les trous abyssaux dans nos caisses de pension. C’est toutefois au prix d’un sacrifice substantiel que l’ensemble de la fonction publique a dû digérer la transition, juges cantonaux, procureurs et chancelier inclus.
    Aujourd’hui, nous attaquons le dernier bastion des retraites, celui des Conseillers d’Etat. Et là, le slogan « faites ce que je dis, pas ce que je fais » prend tout son sens. Au lieu d’adapter les retraites aux canons de la LPP et de la primauté des cotisations, la révision proposée maintient un régime ne comptant que cinq (sic !) actifs – merci pour la bureaucratie – et assied un système octroyant des privilèges pour ceux qui ont l’honneur et la tâche de mener le canton.
    L’époque où changer d’activité durant sa vie relevait une gageur n’est plus. Les Conseillers d’Etat sont généralement élus avec un deuxième pilier solide et rien ne justifie qu’ils ne cotisent pas dans la même mesure que chacun des contribuables. Est-il juste que les citoyens financent, en plus de leur propre retraite, celle d’élus dont le traitement et la position sociale reste relativement confortable ? Est-il acceptable que le Valais, en proie à des difficultés financières importantes, continue à assurer des rentes dix à vingt fois supérieures au montant cotisé ?
    La révision de cette semaine constitue une occasion en or de changer le système. Soumettre les Conseillers d’Etat au régime ordinaire de retraite, celui que nous tous connaissons tous, est une belle opportunité de moderniser notre canton, sur un point mineur, mais symbolique. Pour tous, sans privilèges, un joli slogan pour les élections. Tiendra-t-il face à la réalité des faits ? Réponse jeudi. Ou, à défaut, devant le peuple en cas de référendum.

    Traitement du dossier

    La proposition du PLR pour soumettre les retraites du Conseil d’Etat au régime ordinaire, plutôt que les privilèges actuels (retraite complète après 8 ans), est combattue.
    J’ai demandé au Chef de Service, Gilles de Riedmatten, qu’il m’expose les arguments qu’il a bien voulu donner aux autres groupes.
    Sa réponse:

    « Monsieur le Député,
    En réponse à votre message de tout à l’heure je vous informe que mon emploi du temps est actuellement surchargé et qu’en raison des priorités déterminées je n’ai pas de temps à vous consacrer ni cet après-midi ni dans les jours à venir.
    Veuillez agréer, Monsieur le Député l’assurance de mes sentiments distingués.
    Gilles de Riedmatten »

    Visiblement, la proposition dérange et l’administration ne s’estime pas devoir répondre aux questions des députés durant les sessions. Ils ne marquent pas des points…

    Le Communiqué du PLR

    Le groupe PLR au Grand Conseil, réuni en séance hier soir, a décidé de s’opposer au projet de réforme de la caisse de pension des Conseillers d’Etat qui sera discutée lors de la prochaine session parlementaire. Bureaucratique, coûteux et inégalitaire, le PLR veut une réforme des retraites des magistrats qui corresponde à ce que connaissent tous les citoyens, sans privilège. Le groupe proposera à l’assemblée du PLR de jeudi prochain 14 novembre 2013 de lancer un référendum le cas échéant.
    Cinq, c’est le nombre d’actifs assurés par la future caisse de prévoyance professionnelle des magistrats de l’ordre exécutif. Contrairement à ce que connaissent tous les salariés de Suisse et les employés de la fonction publique valaisanne, le projet soutenu par le Conseil d’Etat et par la commission thématique ne prend pas en compte les principes pourtant loués par l’exécutif valaisan lors de la création de la CPVal (Caisse de retraite de l’Etat du Valais). Faites ce que je dis, pas ce que je fais ! Il sied de rappeler que d’autres hauts magistrats, parmi lesquels les procureurs, les juges cantonaux et le chancelier, ont déjà été transférés dans le régime commun.
    Par un amendement, le PLR proposera au Grand Conseil d’abolir ce régime de privilèges pour incorporer les futurs Conseillers d’Etat dans la CPVal et revenir sur un régime de faveur incompréhensible à l’heure de la généralisation des systèmes de primauté des cotisations.
    Pour le PLR, il est inacceptable de maintenir des exceptions pour une poignée de magistrats. Au-delà de la bureaucratie idiote que cela engendre, la création d’un système privilégié engendre un sentiment d’injustice pour tous les citoyens qui sont eux soumis au régime ordinaire. Les libéraux-radicaux ne s’opposent par contre pas à une discussion sur le salaire des Conseillers d’Etat, au besoin.
    En cas de refus, le groupe proposera à ses membres, le 14 novembre prochain, de lancer le référendum contre cette loi désuète avant d’être en vigueur. Le Valais mérite un Etat moderne, progressiste et adapté à son époque ; à l’heure où les comptes publics ne permettent plus de largesses inconsidérées, adopter une telle loi constitue une anomalie que le peuple, au besoin, se chargera d’abroger.

  • Angela Merkel : vous n’avez rien à craindre si vous n’avez rien à cacher.

    Angela Merkel : vous n’avez rien à craindre si vous n’avez rien à cacher.

    Publié dans le Nouvelliste, le 29 octobre 2013.
    Ironie de l’Histoire. Ceux qui s’indignent aujourd’hui de l’espionnage pratiqué par le gouvernement américain ne trouvaient rien à redire lorsque les fiscs allemand et français achetaient des CDs de données volées. C’est avec les honneurs que les Falciani et autres Condamin Gerbier furent accueillis par les « grandes démocraties » européennes. Drapés de vertus, c’est au nom de la lutte contre les fraudeurs que nos partenaires économiques nous ont imposé tour à tour les demandes groupées d’informations, FATCA, l’échange automatique, l’espionnage industriel et la délation comme morale politique.
    Personne n’approuve l’évasion fiscale, comme il ne se trouve aucune voix pour encenser la fraude aux assurances sociales ou les délits financiers en tout genre. Toutefois, la tradition démocratique exige que les enquêtes fiscales soient réalisées dans un cadre strict de légalité, garantissant aux citoyens concernés la possibilité de se défendre. L’abolition du secret bancaire, tant souhaitée par les dirigeants d’Etats en faillite, liquide les garanties de procédure pourtant inscrites dans les conventions internationales de protection des droits de l’homme.
    A de multiples reprises, pour couvrir quelques établissements financiers peu scrupuleux, le Conseil fédéral a capitulé face aux exigences étrangères, poussant l’absurde jusqu’à reconnaître le fraudeur du fisc comme l’ennemi public numéro un. Il sera permis au fisc de mettre son nez dans les comptes des individus sans aucun contrôle. A titre de comparaison, placer sous écoute un pédophile présumé exige l’intervention d’une autorité indépendante. Ce droit ne sera plus accordé à l’indépendant suspecté d’avoir rempli incorrectement sa déclaration d’impôts. Notre société combat avec plus de célérité les tricheurs du fisc que les criminels de droit commun, c’est dire…
    Angela Merkel s’émeut d’être surveillée à son insu. Quelle indécence que se plaindre de se voir soumis au même traitement que celui que l’on accorde à ses concitoyens. La sphère privée de la chancelière ne mérite pas davantage de protection que celle des Allemands qui ont le malheur de disposer d’un compte en Suisse. Quelle différence y a-t-il entre l’espionnage pratiqué au moyen de données volées et les grandes oreilles de la NSA qui renseignent le président Obama sur les moindres faits et gestes de son homologue allemande ? Je n’en vois pas.
    Le scandale des écoutes téléphoniques doit pousser notre gouvernement à remettre la question de la protection de la sphère privée sur la table et à montrer que le secret bancaire constitue moins un révolver pointé contre l’Etat qu’une barrière juridique vitale contre les dérives de gouvernements aux abois. Malheureusement, plutôt que de profiter de l’occasion pour mettre un terme au voyeurisme ambiant, le Conseil fédéral préfère marcher dans la combine en cryptant ses communications. Triste réalité.

  • Point de vue: le débat sur 1:12 et les votations fédérales

    Point de vue: le débat sur 1:12 et les votations fédérales

    Emission « Point de vue » sur Canal 9, le 25 octobre 2013.