Chronique publié dans le Nouvelliste, le 12 novembre 2013
A priori anecdotique, le Grand Conseil votera cette semaine une révision du régime de retraite des futurs Conseillers d’Etat. On se souvient du départ de Ruth Metzler et de ses 400 milliers de francs de rente annuelle, on se rappelle l’initiative Minder et son interdiction des parachutes dorés. Certes, nous ne parlons pas des mêmes montants, mais le principe est le même.
La révision proposée réduit le nombre d’années de cotisations : après huit ans passés au gouvernement, contre douze actuellement, ses membres toucheront une pension dès 60 ans. Quelle que soit la prestation de libre passage apportée, la rente sera complète. Un âge de la retraite anticipé, un système de primauté des prestations, le mécanisme est inégalitaire au possible.
Loin de moi l’idée de considérer que l’exercice éprouvant du pouvoir ne mérite pas un traitement digne qui permette aux élus de vivre convenablement. Je ne m’oppose pas, au besoin, à l’idée de reparler du salaire des membres du Conseil d’Etat. Le malaise est cependant réel. Lors de la réforme et de la recapitalisation des caisses de pension du personnel de l’Etat, les cinq chefs de département ont vanté en chœur les mérites du nouveau système par capitalisation. Terminées les retraites déconnectées de la réalité des cotisations, finis les trous abyssaux dans nos caisses de pension. C’est toutefois au prix d’un sacrifice substantiel que l’ensemble de la fonction publique a dû digérer la transition, juges cantonaux, procureurs et chancelier inclus.
Aujourd’hui, nous attaquons le dernier bastion des retraites, celui des Conseillers d’Etat. Et là, le slogan « faites ce que je dis, pas ce que je fais » prend tout son sens. Au lieu d’adapter les retraites aux canons de la LPP et de la primauté des cotisations, la révision proposée maintient un régime ne comptant que cinq (sic !) actifs – merci pour la bureaucratie – et assied un système octroyant des privilèges pour ceux qui ont l’honneur et la tâche de mener le canton.
L’époque où changer d’activité durant sa vie relevait une gageur n’est plus. Les Conseillers d’Etat sont généralement élus avec un deuxième pilier solide et rien ne justifie qu’ils ne cotisent pas dans la même mesure que chacun des contribuables. Est-il juste que les citoyens financent, en plus de leur propre retraite, celle d’élus dont le traitement et la position sociale reste relativement confortable ? Est-il acceptable que le Valais, en proie à des difficultés financières importantes, continue à assurer des rentes dix à vingt fois supérieures au montant cotisé ?
La révision de cette semaine constitue une occasion en or de changer le système. Soumettre les Conseillers d’Etat au régime ordinaire de retraite, celui que nous tous connaissons tous, est une belle opportunité de moderniser notre canton, sur un point mineur, mais symbolique. Pour tous, sans privilèges, un joli slogan pour les élections. Tiendra-t-il face à la réalité des faits ? Réponse jeudi. Ou, à défaut, devant le peuple en cas de référendum.
Traitement du dossier
La proposition du PLR pour soumettre les retraites du Conseil d’Etat au régime ordinaire, plutôt que les privilèges actuels (retraite complète après 8 ans), est combattue.
J’ai demandé au Chef de Service, Gilles de Riedmatten, qu’il m’expose les arguments qu’il a bien voulu donner aux autres groupes.
Sa réponse:
« Monsieur le Député,
En réponse à votre message de tout à l’heure je vous informe que mon emploi du temps est actuellement surchargé et qu’en raison des priorités déterminées je n’ai pas de temps à vous consacrer ni cet après-midi ni dans les jours à venir.
Veuillez agréer, Monsieur le Député l’assurance de mes sentiments distingués.
Gilles de Riedmatten »
Visiblement, la proposition dérange et l’administration ne s’estime pas devoir répondre aux questions des députés durant les sessions. Ils ne marquent pas des points…
Le Communiqué du PLR
Le groupe PLR au Grand Conseil, réuni en séance hier soir, a décidé de s’opposer au projet de réforme de la caisse de pension des Conseillers d’Etat qui sera discutée lors de la prochaine session parlementaire. Bureaucratique, coûteux et inégalitaire, le PLR veut une réforme des retraites des magistrats qui corresponde à ce que connaissent tous les citoyens, sans privilège. Le groupe proposera à l’assemblée du PLR de jeudi prochain 14 novembre 2013 de lancer un référendum le cas échéant.
Cinq, c’est le nombre d’actifs assurés par la future caisse de prévoyance professionnelle des magistrats de l’ordre exécutif. Contrairement à ce que connaissent tous les salariés de Suisse et les employés de la fonction publique valaisanne, le projet soutenu par le Conseil d’Etat et par la commission thématique ne prend pas en compte les principes pourtant loués par l’exécutif valaisan lors de la création de la CPVal (Caisse de retraite de l’Etat du Valais). Faites ce que je dis, pas ce que je fais ! Il sied de rappeler que d’autres hauts magistrats, parmi lesquels les procureurs, les juges cantonaux et le chancelier, ont déjà été transférés dans le régime commun.
Par un amendement, le PLR proposera au Grand Conseil d’abolir ce régime de privilèges pour incorporer les futurs Conseillers d’Etat dans la CPVal et revenir sur un régime de faveur incompréhensible à l’heure de la généralisation des systèmes de primauté des cotisations.
Pour le PLR, il est inacceptable de maintenir des exceptions pour une poignée de magistrats. Au-delà de la bureaucratie idiote que cela engendre, la création d’un système privilégié engendre un sentiment d’injustice pour tous les citoyens qui sont eux soumis au régime ordinaire. Les libéraux-radicaux ne s’opposent par contre pas à une discussion sur le salaire des Conseillers d’Etat, au besoin.
En cas de refus, le groupe proposera à ses membres, le 14 novembre prochain, de lancer le référendum contre cette loi désuète avant d’être en vigueur. Le Valais mérite un Etat moderne, progressiste et adapté à son époque ; à l’heure où les comptes publics ne permettent plus de largesses inconsidérées, adopter une telle loi constitue une anomalie que le peuple, au besoin, se chargera d’abroger.