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Le pernicieux démantèlement du fédéralisme

Philippe Nantermod

Philippe Nantermod

Le pernicieux démantèlement du fédéralisme

Publié dans le Nouvelliste le 10 décembre 2013
Lors des débats sur la révision de la LAT, il a été répété que les cantons n’avaient pas à craindre pour leurs prérogatives. La peur de voir le fédéralisme s’éroder ne servait soi-disant qu’à soutenir un développement territorial chaotique. La révision de l’ordonnance de la LAT montre aujourd’hui que nos inquiétudes étaient totalement justifiées.
On assiste à une tendance lourde de transfert de dispositions de la loi et des plans d’affectation dans le plan directeur cantonal. Quiconque méconnaît le millefeuille indigeste de l’aménagement du territoire n’en perçoit probablement pas les conséquences, pourtant bien réelles.
La loi cantonale sur l’aménagement du territoire est adoptée par le Grand Conseil et soumise au référendum facultatif. Les plans d’affectation relèvent de l’autonomie communale. A contrario, le plan directeur cantonal, arrêté par le canton, est homologué par le Conseil fédéral qui exerce par là une véritable surveillance soutenue par maintes directives et recommandations.
En d’autres termes, chaque transfert d’éléments de la première catégorie d’actes juridiques vers la seconde revient à renforcer un peu davantage le contrôle fédéral sur l’aménagement du territoire.
Selon l’Office fédéral, le plan directeur doit devenir toujours plus complet. Il s’apparente de plus en plus à un grand plan d’affectation à l’échelle du canton, incluant l’emplacement de tous les grands projets (centres commerciaux, remontées mécaniques, infrastructures importantes, etc.) jusque dans des détails qui relèvent aujourd’hui de la liberté d’appréciation des communes. L’OAT révisée prévoit que le plan directeur inclut des mandats pour réduire les zones à bâtir et le développement urbain se verra concrétisé directement dans ce grand machin cantonal.
En bref, la marge de manœuvre des Etats fédérés se réduit comme peau de chagrin. L’Office fédéral devient petit à petit une véritable autorité de surveillance des cantons, en violation crasse de la Constitution fédérale.
Cette évolution inquiète. Les afficionados du coloriage des cartes de la Suisse s’en satisfont certainement, les communes et autorités politiques élues un peu moins. On peut légitimement craindre une uniformisation de l’aménagement de notre sol qui assimile le développement de la Bahnhofstrasse de Zurich avec celui de la rue du Village de Champéry.
Pour couronner le tout, cette semaine, le Grand Conseil devra adopter la révision de la LAT cantonale. Tenez-vous bien. Il est prévu que le plan directeur ne sera plus adopté par le parlement. Mis en parallèle avec les évolutions du droit fédéral, l’aménagement de notre territoire passera ainsi entièrement dans les mains de l’administration cantonale et fédérale, autrement dit sans aucun contrôle du peuple. Si l’on voulait faire du fédéralisme une coquille vide destinées à alimenter les discours de 1er août, on ne s’y prendrait pas autrement.

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