Emplois à la BNS, de qui se moque-t-on ?

Dans un postulat déposé le 13 novembre 2013, je m’étonnais que la Banque nationale suisse, propriété majoritairement des cantons et des banques cantonales, ne propose que des offres d’emploi en allemand et je demandais au Conseil d’Etat d’agir, en sa qualité d’actionnaire, pour que les Romands ne soient pas discriminés lors de l’attribution de ces emplois à forte valeur ajoutée.
Le 13 novembre 2013, lorsque je déposais mon postulat, toutes les offres d’emploi étaient en allemand.
Le 6 mai 2014, lorsque le Grand Conseil ne combattait pas mon texte au stade du développement, toutes les offres d’emploi étaient en allemand.
Aujourd’hui, 28 octobre 2014, à l’heure où j’écris ces lignes, toutes les offres d’emploi sont en allemand.
Le Conseil d’Etat répond à ma demande comme suit (source):

« Ainsi, le plus souvent, le travail s’effectue principalement, voire même exclusivement, dans une seule langue, selon les fonctions. La BNS a développé une pratique selon laquelle les postes sont mis au concours dans la langue qui constitue la langue principale de la fonction et pour laquelle il est requis une maîtrise totale. Vaut ainsi le principe de la langue de la fonction.
Il n’est ainsi pas exact de dire que de manière générale toutes les offres d’emploi de la BNS sont rédigées en langue allemande. Certaines fonctions sont ainsi mises au concours uniquement en français, en anglais, ou même en italien, lorsque ces langues constituent la langue principale de la fonction. Ainsi, chaque candidat qui maîtrise la langue de la fonction peut postuler, indépendamment de son origine ou de sa langue maternelle.
Cette pratique présente l’avantage d’éviter que des candidats s’annoncent pour une fonction dont ils ne maîtrisent pas la « langue de fonction ».

Sur la base de ces éléments, l’on peut ainsi constater que la pratique de la BNS ne revêt pas un caractère discriminatoire.
Contrairement aux conclusions du Conseil d’Etat, je constate, faits à l’appui, que la BNS concentre en réalité ses activités en Suisse alémanique, à Zurich et à Berne, qu’elle favorise clairement les candidatures des personnes de langue maternelle allemande puisque l’essentiel des « langues de fonction » paraît être l’allemand.
J’attends des Conseil d’Etat romands qu’ils s’engagent pour que les diplômés suisses de langue maternelle française aient autant de chances que nos homologues d’outre-Sarine auprès de la BNS. Cette réponse du gouvernement est tout simplement décevante.

Commentaires

4 réponses à “Emplois à la BNS, de qui se moque-t-on ?”

  1. Avatar de xitio.fr/

    Merci pour ces jolies idées <3

  2. Avatar de Simon
    Simon

    Bonsoir,
    Non pouvoir temporel j’entendais l’expression dans sa définition, c’est-à-dire « pouvoir matériel », qui s’oppose justement au droit divin. Donc un terme soyeux pour simplement exprimer « pouvoir politique ».
    La BNS est effectivement détenue par des pouvoirs publics afin d’éviter qu’elle ne le soit par d’autres. Des mécanismes sont en place pour éviter que cette situation ne change, c’est normal. Mais elle ne l’est pas pour que ces pouvoirs publics imposent leur volonté au-travers du conseil d’administration. La constitution l’assure. C’est le conseil de direction de la BNS (les 3 chefs) qui doivent faire des rapports de leurs activités au Parlement, mais tous les processus décisionnels internes sont pris en totale indépendance. La Confédération (donc les cantons) lui ont délégué ce privilège. Le recrutement semble donc un mince collatéral (par rapport par exemple aux décisions de politique monétaire ou de gestion de l’inflation) des prérogatives de la BNS, dont le bon fonctionnement est assuré par son indépendance d’influence politique.
    A nouveau, sur ces 800 collaborateurs, les postes pour lesquels il y a une concurrence (je pense à tous les postes « uniques » qu’offre un établissement de ce genre, donc une minorité des 800 emplois, les autres employés pouvant probablement trouver des emplois similaires dans d’autres domaines, donc le facteur linguistique n’importe pas), le choix définitif ne se fera pas sur des critères linguistiques. Je ne pense pas qu’il soit possible de trouver des exemples de personnes lésées par leurs faibles connaissances en allemand ou en français lors de sélection pour des postes à la BNS.
    Et après tout, c’est la BNS la mieux placée pour savoir quels sont ses critères d’engagement. Si vous devez travailler dans un environnement quasi-germanophone (imposé par le fait que c’est la langue maternelle de 2/3 de nos concitoyens), il est souvent recommandé de maîtriser l’allemand. Ça semble cohérent. Et je préfère avoir à la tête de l’institution la plus puissante du pays des personnes compétentes, qui maîtrise non seulement leur discipline mais aussi leur expression. Il n’y a pas beaucoup de postes à pourvoir, aux plus doués (ou plus motivés) de saisir leur chance.

  3. Avatar de Philippe Nantermod
    Philippe Nantermod

    Bonjour,
    Permettez-moi de vous arrêter. Si la Banque nationale est une entité indépendante de la Confédération, elle appartient aux cantons qui – via les banques cantonales – en sont majoritairement propriétaires et qui, à ce titre, élisent le Conseil d’administration et se comportent comme des actionnaires (http://www.snb.ch/fr/mmr/reference/shares_structure/source/shares_structure.fr.pdf).
    La BNS emploie environ 800 collaborateurs, dont des économistes, et je suis persuadé que nous trouvons d’excellents économistes romands qui ne maîtrisent pas l’allemand, de même que nous trouverons des économistes zurichois qui ne maitrisent pas le français. La réciproque s’impose.
    Lorsque vous dites que la banque est indépendante du « pouvoir temporel », j’imagine (j’espère) que vous ne voulez pas dire qu’elle dépend du pouvoir divin, naturellement. Mais par contre, sa politique de gestion peut être remise en question par ses actionnaires, et elle n’est pas totalement indépendante des pouvoirs publics, les cantons restant les propriétaires…
    Qu’on le veuille ou non, la BNS doit malgré tout rendre des comptes…

  4. Avatar de Simon
    Simon

    Bonjour,
    Malheureusement votre commentaire semble manquer de profondeur. Premièrement la BNS est une entité indépendante. Et si, il y’a plus d’un siècle maintenant, le gouvernement décidait de lui alléguer cette indépendance, leur première motivation était d’éviter que le travail de la BNS ne soit un levier pour des enjeux politiques. Votre demande semble donc aller entièrement dans le sens contraire, insinuant que l’égalité politique entre différentes confessions linguistiques du pays (qui elle est tout à fait légitime, soit dit en passant) soit imposée par des politiques à cette entité, qui se doit d’en être indépendante. La BNS seule doit juger des caractéristiques requises de ses employés (comme toute autre entreprise, d’ailleurs).
    Ensuite, un personnel qualifié pour travailler à la BNS (dans les divisions d’analyse économique, le titre de docteur est un requis minimum…) n’est probablement pas lésé par des barrières linguistiques. Ce n’est en tous cas pas le cas des francophones d’origine qui y travaillent.
    Mais il me semble important surtout de retenir, au-delà des arguments qualitatifs, ce point crucial: la banque centrale est indépendante du pouvoir temporel. Elle n’a donc pas à vous répondre de ses critères d’embauche.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *