Skip to content

La carte d’identité numérique, ce truc inutile

Philippe Nantermod

Philippe Nantermod

La carte d’identité numérique, ce truc inutile

Elle est arrivée certainement vingt ans trop tard. Notre chroniqueur prend le pari que le succès confidentiel de ce gadget montrera une fois de plus que le temps politique n’a rien à voir avec celui du monde réel, ou plutôt virtuel en l’espèce.

Toujours en avance de deux guerres, les Chambres fédérales mettent sous toit une loi sur les identifiants numériques. Roulements de tambour, la carte d’identité électronique va débarquer. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la bataille est sensationnelle.

Côté place Fédérale, les Etats estiment que l’identité est une tâche régalienne et ne saurait être déléguée à des privés. Côté Aar, le National est tenté de confier la réalisation de nos papiers à des entreprises commerciales. Peut-être à cause de la proximité des élections fédérales. On pourrait croire que le destin du monde se joue sous nos yeux. Comme si notre propre identité était en jeu. Et de part et d’autre, on n’hésite pas à brandir la menace nucléaire du référendum.

D’autres supercheries en vue

Cette loi ne sert à rien. Nous n’avons pas besoin de carte d’identité numérique. Dans dix ans, la poignée de sociétés qui auront reçu l’autorisation de délivrer des «e-Id» sera en sursis concordataire ou reconvertie dans une autre supercherie électronique. On parie?

Selon le Conseil fédéral, la carte d’identité électronique doit permettre aux prestataires de «donner confiance dans l’identité et l’authenticité de l’interlocuteur». Elle contribuera à «l’expansion des transactions en ligne, même au-delà des frontières nationales». Non, vous ne rêvez pas. A Berne, nous ouvrons la voie pour des transactions électroniques sans limites. Dans un futur pas si lointain, grâce à nous, vous pourrez réserver un billet d’avion sur internet. Y faire vos courses. Choisir un hôtel, à l’étranger aussi. Peut-être même – qui sait? – gérer votre compte bancaire sans passer au guichet. On n’arrête pas le progrès.

Même à Troistorrents…

Au grand désespoir du monde politique, personne n’a attendu les élus fédéraux pour développer ces services. Depuis des années, la carte de crédit nous identifie. Les Britanniques survivent même sans carte d’identité du tout. Et même ma petite commune de Troistorrents (VS), sans avoir la prétention d’être la plus connectée du pays, offre déjà un comptoir virtuel qui répond à tous les besoins des citoyens. Et pour ce qui ne serait pas prévu, ils répondent au téléphone et aux e-mails. Un peu comme tout le monde.

Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires, disait Montesquieu. Je suis pourtant atterré de voir comment on peut facilement confondre les unes et les autres.

Commentaires

No comment yet, add your voice below!


Add a Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *