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Philippe Roch défend un état de droit à géométrie variable

Philippe Nantermod

Philippe Nantermod

Philippe Roch défend un état de droit à géométrie variable

Dimanche soir, j’ai reçu un courriel de l’ancien directeur de l’Office fédéral de l’environnement, Philippe Roch, invitant les élus au Grand Conseil à gracier Bernard Rappaz le 18 novembre prochain. Selon le Genevois, le chanvrier est un « sage » inspiré de sentiments humanistes et pacifiques. Il ajoute que, « sans entrer dans les détails de ce dossier, il apparaît clairement que la peine à laquelle il a été condamné est démesurée. La justice a fait son travail avec un zèle inhabituel, elle a eu la main trop lourde et elle s’est enferrée dans une attitude sans issue. »
Il y a deux ans, j’ai eu l’honneur de débattre avec le même Philippe Roch de l’opportunité de limiter le droit de recours des organisations écologistes. A l’époque, ce dernier invoquait le principe de « l’état de droit » à tort et à travers pour convaincre que l’initiative était une horreur populiste. Au nom de la primauté du droit et de son application, les décisions des législatifs et du peuple méritaient d’être surveillées et démontées lorsqu’elles enfreignaient la loi. Le peuple lui a donné raison et j’ai perdu.
Sauf le respect que je dois à Philippe Roch, je ne peux que m’étonner que ce qui justifiait les recours des plus virulents écologistes ait perdu toute valeur lorsqu’il s’agit de respecter la sentence d’un Tribunal, confirmée par la plus haute juridiction de la Confédération. Bernard Rappaz a commis de nombreux actes contraires à notre droit pénal. Il savait qu’il prenait un risque en cultivant des produits illégaux, en procédant à des opérations financières douteuses et en enfreignant plusieurs autres normes juridiques. Rattrapé par la justice, l’application du principe cher au constituant genevois exige que le chanvrier soit condamné pour ses actes.
Ce n’est pas par sympathie ou par antipathie que le Grand Conseil refusera très probablement la grâce requise. C’est au nom de l’égalité de traitement, du respect des décisions judiciaires, de la séparation des pouvoirs… et de l’état de droit. La grâce est une soupape qui permet de revenir sur des situations exceptionnelles. Celle de Bernard Rappaz n’a strictement rien d’exceptionnel. Comme tout condamné de droit commun, il doit purger sa peine.
Philippe Roch se trompe lorsqu’il fait appel à l’humanisme et à la raison pour libérer Rappaz. La raison veut au contraire que l’on respecte nos institutions et le condamné purge sa peine. C’est aussi cela le respect de l’état de droit.
Publié dans le Nouvelliste, le 11 novembre 2010

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