Je me suis opposé à titre individuel à la nouvelle loi sur les retraites des conseillers d’Etat, en réclamant qu’ils soient soumis au régime ordinaire des retraites des fonctionnaires. Par 99 voix contre 5 et 2 abstentions, j’ai perdu. Le texte de mon intervention.
Madame la Présidente du Grand Conseil,
Madame et Messieurs les Conseillers d’Etat,
Chères et Chers collègues,
Mesdames et Messieurs,
A titre personnel, je m’opposerai à l’entrée en matière sur cet objet. Je ne saurais toutefois être le seul confetti rouge sur l’écran des votes sans expliquer ma position.
Loin de tout acte de défiance à l’égard des conseillers d’Etat en place, mon vote a pour but de poser la question des retraites de nos élus, sans tabou.
Est-il normal, en 2013, d’octroyer des rentes complètes après un passage de quelques années, dans un organe exécutif ?
Est-il acceptable que les cotisations de l’employeur, par plus de 5 millions de francs, soient 50 fois plus élevées que les cotisations des salariés ? Aucune entreprise, ni publique ni privée, ne peut évidemment envisager pareille disproportion dans les rapports.
Lorsque les premières règles sur les pensions des Conseillers d’Etat ont été arrêtées, on entrait dans une entreprise à dix-huit ans et on la quittait pour prendre sa retraite. A cette époque, la Suisse n’imposait aucune prévoyance obligatoire. La LPP a été instaurée depuis.
Les temps ont changé, Mesdames et Messieurs,
Réorienter sa carrière pour huit ou douze ans n’a plus rien de détonnant.
Il n’est pas rare de changer plusieurs fois d’orientation professionnelle dans une vie.
Personne ne s’émeut à l’idée qu’un citoyen élu au Conseil d’Etat renonce à sa carrière l’espace de quelques années avant de réintégrer le monde professionnel.
Il est des quinquagénaires moins bien armés pour retrouver un emploi que ceux qui ont officié comme chef de département, ces derniers disposant d’ailleurs de compétences dont la société se défait avec regrets.
Les modèles de retraite du personnel de l’Etat ont fortement évolué, dans la plupart des cantons comme sur le plan fédéral.
Un peu partout, les fonctionnaires sont soumis au principe de primauté des cotisations et les règles de la LPP trouvent application dans le secteur public : Valais, Zurich, Berne, plus de 80% des cantons ont fait le pas. A St-Gall, le peuple a même plébiscité dimanche passé un régime qui rend la caisse de pension complètement indépendante de l’Etat.
Il serait dès lors tout à fait envisageable de soumettre nos conseillers d’Etat au régime de la CPVal avec une cotisation salariale et patronale.
Le 3 mars 2013, le peuple et les cantons ont adopté à une majorité de 68% (64% en Valais) l’initiative dite Minder qui interdisait les parachutes dorés pour les sociétés cotées en bourse.
Certes, la rente d’un conseiller d’Etat est sans comparaison avec celle de Daniel Vasella, il n’en demeure pas moins que le signal était clair et qu’il n’y aurait rien de choquant si l’on adaptait le système public à celui adopté par le peuple il y a quelques semaines.
Des sacrifices sont exigés des actifs comme des rentiers. Le Conseil fédéral cherche activement des solutions pour résoudre le problème de financement des retraites sur le long terme. On cherche à pousser les actifs, en meilleure santé, à rester le plus longtemps possible dans le marché du travail. Dans ces conditions, il paraitrait légitime que les élus des exécutifs, compétents et reconnus comme tels, montrent l’exemple en se soumettant au régime commun, celui de la primauté des cotisations.
Tout cela pour préserver l’équilibre intergénérationnel, et par soucis d’équité vis-à-vis des milliers de fonctionnaires qui ont renoncé à leur belle retraite publique pour un modèle par capitalisation, plus juste, mais aussi plus sévère.
Certains invoqueront l’impérieuse nécessité d’indépendance des magistrats. Vous savez pourtant comme moi la sincérité de l’engagement des gens qui aujourd’hui consacrent leur vie à la chose publique. Je refuse de mettre en doute l’intégrité de nos élus, nul besoin d’une pension en diamants pour s’assurer de leur honnêteté.
Pour toutes ces raisons, je vous invite à me suivre, rejeter l’entrée en matière de la loi et inviter le Conseil d’Etat à nous fournir un nouveau modèle de retraite, qui le soumettrait aux principes communs des retraites de tous les employés de notre pays.
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