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Bourses et prêts d’études doivent tenir compte de l’ascenseur social

Philippe Nantermod

Philippe Nantermod

Bourses et prêts d’études doivent tenir compte de l’ascenseur social

Personne n’accepterait que le montant des impôts à payer dépende du revenu de ses parents. Notre système de financement des études relève pourtant de cette logique.
Un jeune qui obtient une aide pour financer sa formation la reçoit en partie sous forme de bourse et en partie sous forme de prêt qu’il doit rembourser. Il est pour le moins curieux, voire injuste, que la répartition entre prêts et bourses dépende du revenu des parents du demandeur. Bien que les moyens familiaux permettent d’évaluer le droit à une aide, c’est au futur ex-étudiant que reviendra la charge de rembourser. Si les parents n’ont pas aujourd’hui les moyens de financer les études de leur enfant, rien ne permet d’affirmer qu’ils l’auront davantage dans cinq ans. La situation familiale avant les études ne préjuge heureusement pas de l’avenir économique d’un étudiant. Un jeune issu d’un milieu très défavorisé deviendra un avocat fortuné grâce à l’aide publique, alors qu’un autre, peut-être dans une situation meilleure au départ, se trouvera dans une situation financière beaucoup plus difficile. Or, le second remboursera davantage que le premier, puisque issu d’un milieu plus favorable.
Ce qui manque dans notre système de financement des études, c’est la prise en compte du rôle d’ascenseur social que jouent les filières de formation. Pour définir la part d’aide à rembourser, le système devrait tenir compte du revenu des bénéficiaires après leur formation.
Les sportifs de haut niveau l’ont compris: après des années passées dans un centre de formation qui leur permet de développer leurs talents, nombreux sont les champions qui rendent la monnaie de leur pièce en aidant ces centres afin que les nouveaux talents puissent en bénéficier. De la même manière, il semble logique que celui qui a pu voir son niveau de vie s’améliorer considérablement grâce à la collectivité participe à son tour à offrir aux jeunes dans le besoin les moyens financiers de suivre des études. Un tel changement de paradigme permet aussi, sans dépenser plus d’argent public, de démocratiser un peu plus les études année après année.
La répartition entre bourses et prêts a échauffé les esprits au Grand Conseil lors des débats de novembre entre les tenants de l’orthodoxie financière et les partisans du tout solidaire. Cette proposition médiane fait l’objet d’une motion qui réconciliera peut-être tout le monde : plus de bourses à ceux qui en ont réellement besoin, plus de remboursements de la part de ceux qui en ont les moyens.
Publié dans le Nouvelliste, le 22 décembre 2010

Commentaires

1 Comment

  1. Bonjour Philippe,
    J’ai lu ton article avec intérêt car je suis moi-même en fin de formation universitaire et intéressé par les questions politiques et économiques. Je me permets de placer dans ce commentaire mon opinion sur le sujet, certes aux antipodes du tien, afin de nourrir quelque peu le débat sur le sujet,
    Il me semble que tu oublies une variables fondamentale, à savoir l’accès aux études pour les personnes à revenu faible, voir pauvres. Il a été montré que les pauvres, ou les jeunes issus de famille à situation précaire, n’osent parfois même pas envisager de faire de longues études, car le risque est trop grand pour eux de se retrouver dans une situation encore plus dramatique si les choses ne tournent pas en leur faveur. Cela signifie que la décision est souvent prise avant même de se questionner sur le choix d’une matière en particulier. Il n’est dès lors plus question de s’interroger sur l’ascenseur social que représentent les études universitaires, mais sur le simple fait de oui ou non en commencer.
    Au nom de l’égalité des chances quant à l’accès à une formation plus poussée, il semble que les incitations financières doivent y jouer un rôle fondamental. Cet accès doit donc être le même pour tous, et ce, peu importe les études choisies. Ceci implique évidemment une aide inversement proportionnelle au revenu des parents.
    Ensuite, ta théorie intéressante sur le système de bourse pourrait conduire selon moi à un biais dans le choix même des études entreprises par les plus pauvres. Ceux-ci devraient dès lors s’orienter vers les branches où leur revenu futur ne devrait en théorie pas être trop élevé, afin de recevoir une aide qui, bien que nécessaire, ne leur serait jamais offerte s’ils choisissaient un domaine dont le rendement attendu serait supérieur.
    Finalement, il ne s’agit que de « revenus théoriques », l’assurance d’un revenu élevé n’étant pas acquise, qu’importe la formation. Certains ont la chance de trouver des places de stage dans les domaines qui les intéressent immédiatement après leurs études, mais ce n’est pas le cas pour tout le monde, et il n’est pas rare que des conversions à 180° DOIVENT être effectuées. Attention, je ne nie en rien l’investissement sur la vie future que représente les études, je souligne juste que les fruits de cet arbre ne seront pas forcément de la taille et de la couleur espérée. Il se peut aussi que des réorientations aient lieu durant les études elles-mêmes, ce qui impliquerait une adaptation des bourses et donc un coût supplémentaire en termes de bureaucratie, cela même que, si je ne me trompe pas, ton parti cherche à combattre.
    Il s’agit d’une liste des arguments qui me parassaient les plus percutants, mais la discussion reste ouverte évidemment !


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