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Le développement urbain est-il de droite ou de gauche?

Philippe Nantermod

Philippe Nantermod

Le développement urbain est-il de droite ou de gauche?

C’est la question à laquelle j’ai du répondre pour le site des urbanités de la RSR (http://urbanites.rsr.ch/). Voici ma réponse.
Le développement urbain est-il de droite ou de gauche ?
A priori, il est difficile classer tout un domaine public à gauche ou à droite. Est-ce que l’écologie est de gauche ou de droite ? Les finances publiques sont-elles de gauche ou de droite ? Le simple fait de se prononcer plus souvent sur un thème ne le teinte pas d’une couleur politique ; ce n’est que le point de vue que l’on adopte qui fait écho à une couleur politique.
Oui, mais bon. Il faudra malgré tout bien répondre à la question.
En conséquence, je propose d’opposer le développement urbain au développement que l’on connaît aujourd’hui, qui n’est pas particulièrement davantage urbain que rural. Vu ainsi, je pense que le développement urbain est de gauche.
Le projet de loi visant à remplacer l’actuelle LAT (Loi sur l’aménagement du territoire) ou les nouveaux plans directeurs établis dans le canton de Vaud sont tous issus de milieux que l’on pourrait plutôt classer à gauche. Ils découlent des dernières modes écologistes, celles de ceux qui pensent « global » face aux vieux réacs’ qui ne voient pas plus loin que le bout de leur clocher.
La vision qui y est véhiculée se veut résolument urbaine. Les nouvelles zones à bâtir doivent être limitées aux espaces dont la desserte en transports publics est excellente, excluant ainsi toute la portion du territoire en dehors des grandes agglomérations. Selon ces planifications « modernes », la campagne habitable se limite à celle qui pourra petit à petit se transformer en ville, en banlieues. Ce raisonnement a ses arguments : diminuer du trafic, améliorer l’utilisation des énergies ou des services publiques en général. Ce concept est néanmoins liberticide. Le droit de chacun de choisir l’endroit où il veut s’établir ne doit pas passer si facilement par le compte de pertes et profits. Vivre en dehors de tout a aussi des avantages, mais peut nécessiter par exemple l’utilisation d’une voiture – pêché capital de ce début de siècle. Si l’on considère que la diminution du trafic est un but en soi, on ne pourra que refuser ce mode de vie décadent.
La  pensée libérale n’est pas aussi autoritaire. Les libéraux admettent que l’homme vit dans la nature, et non pas à côté. Cette perspective se conçoit avec l’idée que la nature est au service de l’homme, et pas l’inverse. Cela ne signifie nullement qu’il faille saccager les paysages ou bétonner le Léman, mais plutôt qu’il est permis à l’homme de s’installer à la campagne. Qu’il est même souhaitable de ne pas tout concentrer.
Quand on oppose développement urbain au développement que l’on a connu jusqu’ici, force est de constater que l’on change complètement le paradigme que l’on connaissait jusqu’ici. Aujourd’hui, c’est d’abord l’individu qui décide en fonction des règlements établis par les communes, conformément aux plans directeurs cantonaux qui doivent se conformer aux plans sectoriels de la Confédération. Le véritable pouvoir reste dans les mains de la localité, voire du citoyen. Les nouveaux projets de loi inversent ce principe. Dans un objectif planificateur, les grandes lignes de la planification cantonale seront déjà décidées « en haut ». C’est d’ailleurs là le seul moyen d’imposer un développement urbain aux dépens d’un développement de la campagne que les citadins voient parfois d’un mauvais œil.
Cette planification est dangereuse. Elle condamne à l’oubli silence toute une partie de notre histoire, de nos traditions. L’opposition ville – campagne ne doit pas aboutir au remplacement de l’une par l’autre, les deux sont complémentaires et indispensables, même dans une perspective de croissance de l’espace habité. Or, on a tendance à vouloir imposer les goûts des uns aux habitudes des autres. Développer la ville est nécessaire, voire urgent face au manque de logement dans les zones à forte densité. Il n’est pas pour autant indispensable de traiter les habitants de la campagne comme des indiens dans une réserve au service des hobbies citadins. Vous voulez vivre dans une villa à la campagne ? Je ne vois pas au nom de quoi on devrait vous en empêcher. La réponse libérale à cette question montre que le développement urbain à l’exclusion des autres est de gauche alors que le développement en général est de droite.

Commentaires

4 Comments

  1. Il est vrai que je n’ai pas que des accointances avec les associations de protection de l’environnement qui pêchent par dogmatisme et ne représente à mon avis que la bonne pensée politique en vigueur.
    Vous définissez assez bien ma vision de l’aménagement du territoire. La priorité doit être donnée à l’individu, à la commune, bien avant les services du DETEC ou je ne sais quel docteur travaillant au service de l’ARE.
    Le projet de LDTer visant à remplacer l’actuelle LAT est l’ouverture d’une véritable guerre ville – campagne, est une compilation de « visions » de nos écoles polytechniques, visions qui seront très probablement contredites dans dix ans au gré de l’évolution des modes.
    L’idée qu’il faille imposer aux cantons une densification du bâti, le développement unique des centres urbains ou encore criminaliser ce qu’ils appellent la « thésaurisation de terrains » me gêne profondément: l’aménagement du territoire est en priorité de la compétence des cantons, le projet de LDTer est clairement le retournement du principe, contrairement à ce que prétend le DETEC.
    Je n’ai jamais prétendu que la liberté se définissait comme le droit de faire n’importe quoi. Contrairement à ce que vous affirmez, je prétend qu’il faut beaucoup de courage pour contredire les déclarations des spécialistes fédéraux et s’opposer à cette idée que tout va être bousillé si on ne planifie pas. J’ai horreur des plans en politique, je préfère faire confiance aux gens.
    Meilleures salutations.

  2. Merci pour votre réponse.
    J’ai bien compris votre dégout et aversion des milieux écologistes, spécialement depuis votre fine campagne contre le droit de recours. C’est votre point de vue…difficilement défendable au regard de votre large défaite et surtout du bon sens, mais nous sommes en démocratie et vous avez le droit d’exprimer votre bêtise.
    D’après votre réponse, votre solution à l’aménagement du territoire se résume à ceci: « Qu’on foute la paix au maximum aux particuliers et aux communes et qu’on laisse les gens mener la vie qu’ils ont envie de mener ».
    Votre notion de la liberté est pervertie. La liberté, ce n’est pas faire n’importe quoi, c’est faire par choix en connaissance de cause, c’est un acte courageux, celui qui vous manque. Vous ne parlez pas de liberté quand vous prônez le laissez faire, mais l’égoïsme et le replis sur soi.
    Meilleures salutations.

  3. J’ai été invité à répondre à cette question: « le développement urbain est-il de gauche ou de droite ? » pour les Urbanités. Je vous accorde que cette question n’est pas très pertinente, mais j’ai bien du y répondre. Et je l’ai fait au regard des évolutions actuellement proposées, notamment du P-LDTer (projet de loi sur le développement territorial, destiné à remplacer l’actuelle LAT).
    Je ne sais pas quelle est la position de mon parti sur le sujet, je suis personnellement archi-contre cette idée qu’il faille accorder encore des compétences aux techniciens et autres docteurs de EPF pour aménager le territoire. On n’y parle que de développement urbain vers l’intérieur, de mitage du sol, de réduction des zones à bâtir. Mon point de vue ne correspond pas aux canons de la mode, en effet, mais il reste clair: Qu’on foute la paix au maximum aux particuliers et aux communes et qu’on laisse les gens mener la vie qu’ils ont envie de mener.
    Je m’oppose à tous ces grands concepts développés pour le « projet de territoire suisse » dans lequel on a décidé qu’il était bien de vivre en ville, de prendre le bus et de consommer bio et qu’il était inadmissible de vivre en famille dans une villa, en dehors de la ville, d’avoir deux véhicules et de manger de la viande. J’accentue juste un peu le trait.
    Le projet qui nous est soumis est un projet dirigiste dans lequel on ne parle que de planifier, d’harmoniser, de collaborer. En réalité, il s’agit seulement d’imposer un point de vue défendu par certains milieux environnementaux que je conspue.

  4. Quand certaines personnes n’ont rien à dire et qu’elles tiennent à s’exprimer malgrès tout, elles tapent sur quelqu’un plutôt que de trouver des solutions constructives: votre article en est un bel exemple. Qu’est-ce qu’on s’en fout de votre clivage gauche-droite, qui, soit dit en passant, fait très arrière garde…
    Et puis vos dogmes à 2 balles sur la liberté… La véritable liberté s’acquiert et est responsable: l’urbanisme et la gestion du terrritoire sont de véritables problèmes en Suisse, quels sont vos solutions et celles de votre parti en perte de vitesse et d’idées?
    Meilleures salutations


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