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Malgré quelques défauts, le passeport biométrique est un progrès

Philippe Nantermod

Philippe Nantermod

Malgré quelques défauts, le passeport biométrique est un progrès

Les Suisses sont réputés méfiants face à la récolte de données que la Confédération pourrait entreprendre. Les nouveaux documents d’identité en sont un exemple, plus ou moins imposés par les accords de Schengen. Ceux-ci auront la particularité d’être munis d’une puce RFID qui contiendra les données actuellement existantes en format numérique, agrémentées de deux empreintes digitales.
Le projet avait fait l’objet d’un large consensus au Parlement et il ne se trouvait aucun parti pour lance le référendum. C’est un groupe de citoyens – principalement d’extrême gauche – qui a utilisé les possibilités d’internet récolter les 50’000 signatures qui nous amèneront tous aux urnes le 17 mai prochain.
Les opposants arguent que les informations récoltées seront stockées dans une base de donnée fédérale. Si cela est vrai, il est important de rappeler que la Confédération pratique ainsi depuis 2003 pour nos bons vieux passeports analogiques, sans soulever de problème jusqu’alors. Si l’on ne peut que s’opposer avec conviction à un fichage de la population par l’Etat, les données des passeports biométriques ne sont pas suffisamment sensibles pour entrer dans cette catégorie: une photo, quelques informations de base (âge, taille, couleur des yeux, des cheveux), et les empreintes digitales. À peine plus détaillées qu’un bon bottin de téléphone et beaucoup moins précises que ce que chacun abandonne volontairement sur facebook, ces données ne peuvent servir qu’à contrôler la véracité d’un document d’identité, voire (et cela n’est même pas prévu) à établir plus facilement les suspects dans une affaire criminelle. Le nouveau passeport n’est pas une super carte cumulus qui contrôlera vos moindres faits et gestes. Peut-être que le terme « biométrique » fait peur, retrouvant le fantasme contemporain de l’eugénisme lié aux recherches en matière de génétique ? Rappelons simplement que l’empreinte digitale ne renferme pas de donnée personnelle, est plus précise tout en étant moins sensible qu’une photo quant à la préservation de l’anonymat de l’utilisateur. Et n’a rien à voir avec le fameux ADN.
Je m’étonne de constater à quel point les mêmes milieux peuvent se plaindre de l’atteinte à la sphère privée que constituerait l’enregistrement d’empreintes digitales, sans s’émouvoir une seconde de ce problème face à la fin programmée du secret bancaire. Ce dernier principe est pourtant davantage essentiel dans la protection de la personnalité de l’individu. Les risques d’atteinte de l’Etat contre la sphère privée sont largement amplifiés par un accès détaillé aux informations quant aux ressources de l’individu que par la forme du dessin du bout de ses doigts. À moins d’être un criminel, et encore…
À bien y réfléchir, le passeport biométrique présente quelques défauts pratiques. Son prix ou le fait que la technologie nécessite un regroupement des centres d’enregistrement. Globalement, il offre pourtant des garanties contre la falsification des documents d’identité et constitue un progrès indéniable dans la lutte contre le crime organisé et le terrorisme. Sans être parfaite, cette loi mérite d’être acceptée.

Commentaires

7 Comments

  1. je vous emmerde, bientôt vous allez mettre les casier judiciaire de chaq’un sur cette puce! et pourquoi pas un son CV!!!

  2. http://www.youtube.com/watch?v=4HngStyEm4s&feature=PlayList&p=3EB130354469B7B0&playnext=1&playnext_from=PL&index=4
    Pour bientôt ?
    « Le vol des données présentes sur la puce, peut-être, mais à quoi bon ? Tu obtiens mon empreinte digitale (il y a d’ailleurs des moyens plus simples de le faire) et t’en fais quoi ? »
    L’empreinte digitale peut être facilement reproduite sur un support qui – comme la lentille pour les yeux – peut remplacer sa propre empreinte.
    Pour le vol de donnée, cela pose effectivement problème car la reconnaissance faciale n’est pas une science exacte, et laisse l’éventualité d’une imposture. (tu vas me dire que ça ne change rien face à l’ancien passeport, mais le vol de donnée à l’INSU de la victime provoque une baisse radicale de sécurité vis-à-vis de l’ancien passeport).

  3. Ah, Philippe! Décidément, on est rarement sur la même longueur d’onde d’un point de vue politique 😉
    Par contre, ça m’étonne que tu parles des milieux de gauche comme soutien du référendum, alors que notre propre parti (les Jeunes libéraux-radicaux suisses) s’est positionné contre les passeports biométriques…Comme quoi, il faut croire que ce n’est pas l’apanage de la gauche d’être attaché au respect de la sphère privée.
    Quant à l’objet en lui-même, je pense que tu sous-estime largement les inconvénients d’un tel type de passeport, notamment du point de vue de la sécurité…Je me permets de renvoyer sur ce point à mon texte contre le passeport biométrique : http://sdavid.blog.24heures.ch/archive/2009/04/05/une-securite-illusoire-ne-justifie-pas-la-perte-du-choix-ind.html
    Fais-moi signe quand t’es à Lausanne et que t’as du temps!

  4. @Benoît. En effet, pas très commenté. Je trouve intéressant ce point de vue qui consiste à ne voir les limites aux libertés que dans la mesure des besoins de l’Etat. L’essentiel pour moi est plutôt la protection de la liberté (ou du secret, c’est ici la même chose) du point de vue de la force de l’atteinte.
    Or, le passeport biométrique ne constitue pas une atteinte importante du tout. Il ne contient pas de donnée sensible ou particulièrement personnelle, il est simplement un peu moins falsifiable que l’actuel. La sphère privée de l’individu n’est en tous cas pas concernée. Par contre, en limitant le secret bancaire, la question se pose autrement.
    Pour les signatures, j’ai surtout vu Julien Sonsonnens, ce qui me vaut de lui tirer mon chapeau. Joli coup. Merci pour ton empreinte. Faut vraiment qu’on aille se boire un verre un de ces quatre….
    @Gaël. Ce passeport n’est pas complètement infalsifiable, d’ailleurs rien de ce qui est créé par l’homme ne l’est à ma connaissance. Simplement qu’il est plus facile de faire un faux passeport tel qu’il existe maintenant que de falsifier un passeport numérique. Quant à une falsification à distance, je n’y crois assez peu. Il faut voir quel est le fonctionnement de la puce RFID, mais si elle n’a pas de fonction d’écriture, ça m’étonnerait franchement que l’on puisse lui donner l’ordre de se modifier toute seule.
    Le vol des données présentes sur la puce, peut-être, mais à quoi bon ? Tu obtiens mon empreinte digitale (il y a d’ailleurs des moyens plus simples de le faire) et t’en fais quoi ?

  5. Le seul défaut du passeport biométrique, qui est une raison suffisamment valable pour le refuser, est … la possibilité de le pirater (à distance selon une expérience allemande) ! Il faut savoir que dans le domaine de la sécurité, les hackers ont toujours une longueur d’avance sur les mesures de sécurité. C’est pas moi qui le dit, ce sont des experts en sécurité informatique.
    Le vol des données présentes sur la puce (à l’insu de la personne) est donc facilité vis-à-vis d’un passeport conventionnel, puisque celui-ci peut se faire à distance.
    Qu’en penses-tu Philippe ??

  6. pas très commenté, ce blog… j’en profite, alors.
    quoi qu’il en soit, l’argumentation est un peu faible et sent le sujet mal préparé, malheureusement.
    1. ce n’est pas l’extrême-gauche qui a principalement récolté pour le référendum. au contraire, ce sont plutôt des personnes apolitiques voire très libérales qui se sont investies à la base.
    2. le raisonnement est logique pour s’opposer en même temps à la biométrie obligatoire et au secret bancaire: l’idée, c’est que l’Etat prélève les données nécessaires à l’exécution de ses tâches (comme prélever des impôts décidés démocratiquement), pas les autres (Schengen ne demande pas de fichage central, l’Allemagne ne l’a pas fait, etc.). non?
    allez, c’est pas si grave, je voulais surtout laisser mon… empreinte sur ce blog.


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