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  • Et pourquoi pas une élection par le peuple ?

    Le lapin sorti d’un chapeau. C’est définitivement la plus jolie manière d’illustrer la campagne de l’été.
    Nombreux sont les ‘’observateurs’’ qui enjoignent l’Assemblée fédérale à choisir une personnalité compétente, à transcender ce vieux concept éculé de parti ou de région linguistique. Qui peut donc affirmer Urs Schwaller davantage compétent que Martine Brunschwig-Graf ? Christophe Darbellay serait moins qualifié que Didier Burkhalter ou que Luc Recordon ? Celui qui peut se targuer de figurer sur la liste des « conseilfédéralisables » doit forcément se montrer compétent. Hormis Elisabeth Tessier, nul ne peut prédire les qualités futures d’homme d’Etat de l’un ou de l’autre.
    Avec un gouvernement de concordance comme le nôtre, la question du parti – et par extension de l’origine géographique – est essentielle. Le deuxième siège libéral-radical est légitime, tout comme pourrait l’être, à condition de changer de système, un siège Vert. Il n’existe par contre aucune justification pour un deuxième PDC. Il n’y a pas de raison valable pour qu’un parti à 14.4% dispose de plus de sièges qu’un parti à 17.5%.
    L’élection du Conseil fédéral par l’Assemblée fédérale avait jusqu’ici l’avantage de la stabilité. Les Parlementaires, protégés par le secret de leur vote, se plaçaient au dessus de la mêlée et choisissaient après mûre réflexion. Aujourd’hui, on se croirait sur eBay. Chacun y va de sa petite revendication : les socialistes aimeraient un libéral communard, les PDB demandent en échange de leurs misérables six voix le soutien de tout un groupe en 2011. « T’auras mes voix si tu me donnes les tiennes » est devenu notre modèle institutionnel.
    Comme nous avons pu l’observer avec l’élection de Ueli Maurer, la désignation du Conseil fédéral se joue dans un mouchoir de poche, pour une ou deux voix. Et pas entre deux prétendants issus du même bord, mais entre deux courants politiques différents. Ce système électoral qui garantissait jusqu’ici la stabilité assure désormais les gros titres de la presse et l’incertitude la plus complète sur l’évolution de la composition gouvernementale. C’est un vrai changement de système. D’une cohésion réfléchie, on est passé à une loterie.
    Une élection du Conseil fédéral par le peuple aurait aujourd’hui l’avantage de la stabilité. L’ordre de représentation des partis lors des élections fédérales est stable depuis 1995 : UDC – PS – PLR – PDC. La composition du gouvernement a depuis par contre déjà changé deux fois et on nous promet encore de nouveaux bouleversements dans les mois à venir.
    Sans parler de l’attrait politique. Je parie que l’élection du Conseil fédéral par le peuple serait l’occasion de mettre en avant un programme national comme les élections fédérales actuelles ne le permettent malheureusement pas et de donner des visages marquants aux idées politiques.
    Quant au mode de scrutin, des solutions permettent de respecter les régions et la force des partis. Rappelons qu’au moins trois gouvernements cantonaux élus par le peuple présentent une diversité linguistique et culturelle.  La question n’est pas extrémiste. La majorité des nations élisent leur gouvernement, la question a sa légitimité, chez nous aussi.

  • MP3 sur la RSR

    Je remercie Michel Masserey qui a réalisé une très jolie série d’émissions où j’ai pu à loisir étaler mes goûts musicaux…

    Je vous laisse découvrir ! Et vous vous auriez choisi quoi ?
    Episode 1, 29 juin 2009
    Episode 2, 30 juin 2009
    Episode 3, 1er juillet 2009
    Episode 4, 2 juillet 2009
    Episode 5, 3 juillet 2009.

  • Urs Schwaller, un Romand ?

    Il était le remplaçant désigné de Widmer-Schlumpf en 2007, au cas où celle-ci renonçait. Suisse-allemand en 2007, Romand en 2009.
    Mais poussons la logique jusqu’au bout. Il suffit d’être aussi bilingue que son canton d’origine pour pouvoir jouer les caméléons.
    1) Gardons Micheline Calmy-Rey.
    2) Remplaçons P. Couchepin par Didier Burkhalter.
    3) Leuenberger par le Jurassien bernois Maxime Zuber
    4) Ueli Maurer par Oskar Freysinger
    5) Doris Leuthard par Dominique du Buman
    … et on verra la tête des Suisse allemands. Dans le fonds, selon la logique affirmée pour M. Schwaller, cette configuration comprenant cinq personnalités sur sept d’origine et de langue maternelle romande est une configuration 5 Alémaniques – 2 Romands.
    Mouais.

  • Le prix unique : une mauvaise solution au mauvais problème

    Contre l’avis de son Argovienne de Conseillère fédérale, le groupe PDC au Conseil national a soutenu le retour en fanfare du prix unique du livre. Par prix unique, il faut comprendre l’instauration d’un prix minimum destiné à empêcher de trouver des ouvrages trop bons marchés.
    Socialistes, pédécés et divers gauches s’entendent donc sur ce merveilleux projet, martelant que le livre n’est pas un bien comme les autres,  pas une marchandise, pas un produit commercial.  Pourtant, si l’on interroge les fabricants de papier, les éditeurs et les distributeurs, on peut se demander ce qui distingue tant le livre des autres marchandises : mêmes stratégies commerciales, mêmes problèmes existentiels face à la crise, il paraît difficile de soutenir honnêtement que le livre s’éloigne radicalement en tant que bien de consommation d’une paire de chaussure. Bien sûr, le livre propage le savoir, la culture, la civilisation même, et après ? Quelle différence avec un film, une recette de cuisine, une chanson ou une pièce de théâtre ?
    Objet culturel. Galvauder ce terme ne donne pas davantage de force au livre. Quand l’Etat est revenu sur ce privilège qu’est le prix unique, beaucoup d’intellectuels dénonçaient ce coup de poignard infligé à la culture. L’idée sous-jacente se résumait ainsi : permettre de brader certains best-sellers débouche invariablement sur la disparition des petites librairies et ne laisse survivre que les grands distributeurs dont l’assortiment se résume aux romans de gare, condamnant au passage la Littérature avec un grand L. L’histoire a montré le contraire. Depuis la mise à mort de la réglementation du marché, Payot a ouvert la plus grande librairie de Suisse romande à Lausanne et tant le service que l’assortiment dépasse ce que peut offrir une petite enseigne. Le consommateur – le lecteur pardon – et la culture en sortent gagnant. Jamais un choix pareil n’a été proposé en Suisse romande, et par des professionnels consciencieux. D’autres chaines tentent de rivaliser, les distributeurs en ligne infiltrent les marchés de niche, la concurrence fait tout son effet. Au grand regret de certains ai-je envie de dire, le livre ne se porte pas si mal.
    On peut constater un étranger parallèle dans la moue unanime des intellectuels de gauche que vous obtenez en évoquant le drame de la disparition des salles de cinéma indépendantes dans les villes. Leur nombre diminuerait pour ne laisser de place qu’aux versions françaises des superproductions du Grand Satan. Si le nombre de petites salles a incontestablement diminué ces dernières années, force est de constater que les multiplexes des grands diffuseurs ne proposent pas que des navets. Bien au contraire, on voit apparaître enfin les premiers forfaits tout inclus pour les vrais fans du 7e Art et le nombre de films proposés à la fois est stupéfiant.
    Je comprends les défenseurs des petites librairies. Je suis le premier à apprécier les charmes des petits commerces et du rapport social qui lie le libraire de quartier et le lecteur. Ce rapport se reproduit à l’identique avec le postier, le laitier ou l’épicier.  Le prix minimum du livre ne sert pas à sauver le livre qui se porte très bien, ou pas plus mal que le reste. Le prix unique cache seulement une mesure de sauvetage des petites librairies destinées à subir la douloureuse et sans pitié loi du marché. Cette distorsion de concurrence reste néanmoins injustifiable.  L’Etat ne doit pas soutenir à la hausse le prix des produits de consommation, même quand il s’agit de livres. Au contraire, la lutte contre la vie chère passe aussi par le respect du prix conseillé en quatrième de couverture, et non par un cautionnement forcé du petit commerce. Sinon, il faudra élargir le prix unique aux boulangeries, disquaires et autres épiceries indépendantes. C’est ce que l’on appelle une politique clientéliste.

  • A mon Cher Grégory Logean, président des jUDC-VS

    Cher Grégory,
    A l’heure où l’économie vacille, qu’une grave pandémie menace et que l’on monte les marches à Cannes, toi et tes amis aux idées aussi courtes que leurs cheveux empoignent enfin le problème qui nous inquiète tous: la condamnation publique des pédés. Merci. Du fond du cœur.
    Ainsi, les jUDC valaisans profitent de cette journée mondiale de l’homosexualité pour vomir une de vos têtes de turc préférées: l’homosexuel. Comme toujours avec vous, j’entends la voix de Dalida résonner dans mes oreilles : ‘’paroles, paroles, paroles’’. Des grandes théories, c’est tout ce dont tu es capable. Tu ne proposes rien de concret pour lutter contre ce « vice », cette « déviance » qu’est l’homosexualité, face à laquelle toute la classe politique se couche.
    Faut-il seulement renommer la famille Gay en famille Joyeux pour éviter toute confusion malheureuse ? Ou doit-on déporter tous ceux de la jaquette en Suisse allemande ? Est-il judicieux d’interdire aux hommes la conduite de petites cylindrées, de boire des boissons sucrées et le port des chemises roses ? Dans ton monde, les femmes seront-elles bannies des métiers de bûcheron, de conducteur de camion et de l’armée ?
    Ta haine du politiquement correct est respectable, mais le remplacer par l’idiotie  la plus crasse n’est pas forcément un progrès. Ce qui est particulièrement affligeant dans ton discours, c’est sa vacuité. Honnir les homosexuels n’est pas un message politique. On peut hurler contre les chauves calvinistes, les asiatiques aux oreilles décollées ou les Soleurois adeptes de sbrinz, on n’a pas encore atteint le niveau politique qui impose qu’au-delà de désigner un ‘’problème’’, on tente d’apporter une bribe de solution. Tu en es bien incapable. Parce que rien ne justifie que l’on haïsse des citoyens pour leur mode de vie. Parce qu’aucun raisonnement politique ne peut soutenir pareille idée depuis soixante ans. Sans doute regrettes-tu cette douce période où ‘’famille, travail, patrie’’ voulait encore dire quelque chose, et qu’au nom de ce slogan, on savait traiter comme il fallait juifs, homos et tsiganes.
    Une seule chose est sûre : Dieu est de ton côté. Sinon, le ridicule tuerait.
    Avec mes salutations, mon Cher Grégory.

  • Concilier vie familiale et professionnelle : le défi de nos villes et des entrepreneurs

    Pour les Urbanités (http://urbanites.rsr.ch), j’ai répondu à la question: Quelle place et quels dispositifs pour la jeunesse en ville? Voici ma (une) réponse.
    La Suisse manque de jeunes. Les changements démographiques des dernières décennies et de celles à venir laissent présager une situation assez grave pour notre pays. Le financement de notre système social est en péril, du moins les institutions couvrant le risque de vieillesse et de maladie. À l’image de l’occident en général, les Suisses font peu d’enfants. Il y a pléthore d’explications à ce problème. Seulement, le résoudre est un travail de titan qu’il convient d’aborder au plus vite. Prenons un cas simple, celui de l’accueil de jour des enfants.
    Il faut des crèches. Si ce constat s’impose au regard l’évolution de l’organisation de la vie d’une famille moderne, les moyens pour y parvenir sont assez diffus. D’aucuns réclament des investissements publics faramineux et une action conjointe interventionniste auprès des grandes sociétés pour créer des structures d’accueil.
    On est pourtant en droit de se demander pour quelle raison obscure le domaine de la garde des enfants échappe tant aux règles du marché. Le service proposé répond à une demande croissante, on peut même parler de pénurie en la matière. Or, peu ou pas d’entreprises se lancent dans cette brèche.
    Il existe plusieurs explications à apporter à ce phénomène. L’introduction d’un bon nombre de lois censées protéger la jeunesse a en réalité rigidifié le système par la mise en place de normes relativement démesurées. Depuis le début des années 1990, on assiste à un mouvement de codification des règles en matière de garde d’enfants. Parallèlement, plusieurs filiales de formation se sont développées un peu partout dans le pays pour disposer d’un personnel dit « qualifié ». En quelques années, les établissements privés ont été transformés petit à petit en établissements semi-publics, quand ils n’ont pas été purement et simplement absorbés par les collectivités publiques. Parallèlement, on a interdit au citoyen dit « non qualifié » de garder un enfant qui n’était pas le sien.
    Il est surprenant que, dans un Etat libéral comme le nôtre, après avoir créé les filières de formation, l’Etat se soit cru obligé d’imposer ces diplômes en bloquant l’accès la profession. Un peu comme si les connaissances acquises n’étaient pas suffisamment  valables en tant que telles, qu’il faille une garantie publique en soutien. Je prétends que ces mesures ont davantage servi à justifier l’existence de filières de formation plutôt qu’à améliorer la garde de la petite enfance, tant en qualité qu’en quantité.
    En quantité, la pénurie constatée dans certaines villes illustre bien le problème de la surrèglementation.  Dans un marché normal, une telle demande face à un tel déficit d’offre aurait dû pousser des PME à investir le secteur et à proposer des services de garde de jour. Au lieu de cela, c’est l’Etat qui se retrouve pris de court par l’explosion du besoin de places de crèche.
    En qualité, c’est cette même pénurie qui pousse à instaurer un système à deux vitesses qui péjore gravement la qualité des services. Si une demande peut être placée sur une liste d’attente, force est d’admettre que l’enfant à prendre en charge n’est pas un numéro et devra bien trouver sa place. Alors que les plus chanceux, malins ou influents bénéficient d’une place quatre étoiles pour leur bambin, les autres sont bien obligés de jongler avec voisins, grands-parents ou encore amis. Au regard de la loi, cette situation est regrettable étant donné que les objectifs concernent tous les enfants, pas seulement ceux qui sont issus de la première catégorie.
    Les solutions à ce problème se situent très probablement au niveau d’une flexibilisation des normes en vigueur pour offrir aux entrepreneurs l’opportunité de mettre leur esprit d’innovation au service de la garde de la petite enfance. Non qu’on veuille placer les plus jeunes dans des casiers de gare, il est seulement temps de reconnaître que le privé a su faire ses preuves, tant en matière de qualité des services que dans la lutte contre la pénurie en général.
    C’est pourquoi les jeunes libéraux radicaux valaisans ont proposé en 2007 au Grand conseil valaisan un postulat réclamant l’introduction d’un système de validation des acquis pour les mères et pères de famille. Nous estimions qu’une personne qui a consacré de longues années de sa vie à l’éducation de ses rejetons avait l’expérience nécessaire pour s’occuper d’enfants, du moins autant qu’un jeune homme qui a suivi quelques années de formation dans une Haute école spécialisée. Le mécanisme dit de validation des acquis s’applique actuellement aux individus qui bénéficient d’une bonne expérience professionnelle, sans pour autant disposer d’un diplôme équivalent. Appliqué au domaine de la petite enfance, ce serait reconnaître qu’une maman peut être admise comme travailleuse qualifiée dans le domaine de la garde de la petite enfance, et pas seulement comme auxiliaire.
    Notre postulat a malheureusement été rejeté, pour une seule voix. C’est dommage. Cela aurait été une expérience intéressante qui aurait peut-être permis de découvrir de nouvelles formes de crèches, qui aurait sans doute amélioré l’offre, et ainsi la qualité du service.
    En attendant, le problème reste le même : les jeunes parents sont toujours bien désarçonnés pour trouver une solution à la quadrature du cercle qu’est la conciliation entre vie familiale et professionnelle. Et rien n’indique que l’on voit le bout du tunnel.

  • Remboursons tout et n'importe quoi

    Quand les Chambres ont rédigé le texte constitutionnel sur les médecines complémentaires que nous voterons le 17 mai, elles se sont montrées pleines de bonnes intentions. En remplaçant « prise en charge complète » par « prise en charge » des médecines complémentaires, nos élus s’imaginaient certainement remplir leur rôle traditionnel en proposant un des consensus les plus mous qu’il m’ait été donné de rencontrer. C’est réussi : le texte est carrément incompréhensible tant la transparence des mots est accablante et n’impose rien. Seulement, le peuple fera un choix le 17 mai entre la situation actuelle et une nouvelle situation dont nous ignorons à peu près tout.
    Comprenons-nous, je n’ai sur le fonds rien contre les médecines complémentaires, pas plus que je ne m’oppose à la vis sans fin. Elles existent, chacun en fait ce qu’il veut. Il est seulement question de choisir les conditions d’une prise en charge d’un traitement par l’assurance maladie de base et ce qui ressort du domaine des assurances complémentaires. Selon le système en vigueur, un traitement doit passer le triple filtre efficacité – adéquation – économicité pour être inclus dans le catalogue des soins remboursés. Ces trois critères doivent permettre aux autorités de s’assurer qu’un traitement de base montre un certain effet contre une maladie pour un prix acceptable au regard des médications concurrentes. Ces critères assurent une certaine objectivité dans le choix du catalogue LAMal. Les médecines complémentaires – au même titre que les médecines académiques – y sont soumises et c’est ainsi que certaines préparations phytothérapiques ou des techniques dérivées de l’acupuncture sont aujourd’hui supportées par l’assurance obligatoire.
    Le Parlement propose donc de modifier ces critères. Pour nous proposer quoi ? Bien malin celui qui peut déjà le dire. À discuter avec les consommateurs de médecines douces, il apparaît que le critère qui convient à beaucoup se résume à « ça me fait du bien ». En voilà un bon critère ! Vous vous sentez mieux après le passage de la fée homéopathique ? Remboursons ! Vous appréciez un petit traitement traditionnel chinois ? Remboursons ! Peu importe dans le fonds que l’efficacité de tels traitements n’a jamais été prouvée, que le fameux effet placebo soit observé dans les études. Les mêmes se plaindront de l’augmentation du coût des primes qui, elle, ne fait décidément aucun bien.
    Cette nouvelle manière d’agir sera dangereuse et inégalitaire. Une semaine de vacances au soleil me fait davantage de bien que tous les cachets d’asprine que j’ai avalés cette année. Remboursez ! Mes quelques heures de piscine hebdomadaires me gardent en forme. Remboursez ! Et où nous arrêterons-nous ? Les pratiques SM, les voyages à Lourdes, et pourquoi pas la petite cigarette qui clôt un bon repas ? Ça fait tellement de bien…
    Ce terme complémentaire est tout bonnement mensonger. Il doit être compris comme « qui n’a pas démontré ses effets ». À une autre époque, on aurait parlé de magie ou de soins prodigués par des charlatans. Pour être remboursés, ces traitements sont aujourd’hui soumis aux mêmes règles que leurs concurrents scientifiques. Ce serait tout de même le comble de rembourser les massages thaï sur la simple base d’un sentiment partagés par certains alors qu’une procédure longue et douloureuse s’impose pour autoriser un médicament issu d’années de recherche dans nos meilleurs laboratoires.
    Une assurance complémentaire pour les médecines du même nom coûte actuellement cinq à dix francs par mois. La LAMal n’est pas une religion : ce n’est pas la foi dans des pratiques aussi douteuses qu’ésotériques qui doit définir les prestations de base. Ou alors je me déclare agnostique et je réclame une exemption de ce nouvel impôt ecclésiastique.
    Article écrit et publié pour www.students.ch

  • Le développement urbain est-il de droite ou de gauche?

    C’est la question à laquelle j’ai du répondre pour le site des urbanités de la RSR (http://urbanites.rsr.ch/). Voici ma réponse.
    Le développement urbain est-il de droite ou de gauche ?
    A priori, il est difficile classer tout un domaine public à gauche ou à droite. Est-ce que l’écologie est de gauche ou de droite ? Les finances publiques sont-elles de gauche ou de droite ? Le simple fait de se prononcer plus souvent sur un thème ne le teinte pas d’une couleur politique ; ce n’est que le point de vue que l’on adopte qui fait écho à une couleur politique.
    Oui, mais bon. Il faudra malgré tout bien répondre à la question.
    En conséquence, je propose d’opposer le développement urbain au développement que l’on connaît aujourd’hui, qui n’est pas particulièrement davantage urbain que rural. Vu ainsi, je pense que le développement urbain est de gauche.
    Le projet de loi visant à remplacer l’actuelle LAT (Loi sur l’aménagement du territoire) ou les nouveaux plans directeurs établis dans le canton de Vaud sont tous issus de milieux que l’on pourrait plutôt classer à gauche. Ils découlent des dernières modes écologistes, celles de ceux qui pensent « global » face aux vieux réacs’ qui ne voient pas plus loin que le bout de leur clocher.
    La vision qui y est véhiculée se veut résolument urbaine. Les nouvelles zones à bâtir doivent être limitées aux espaces dont la desserte en transports publics est excellente, excluant ainsi toute la portion du territoire en dehors des grandes agglomérations. Selon ces planifications « modernes », la campagne habitable se limite à celle qui pourra petit à petit se transformer en ville, en banlieues. Ce raisonnement a ses arguments : diminuer du trafic, améliorer l’utilisation des énergies ou des services publiques en général. Ce concept est néanmoins liberticide. Le droit de chacun de choisir l’endroit où il veut s’établir ne doit pas passer si facilement par le compte de pertes et profits. Vivre en dehors de tout a aussi des avantages, mais peut nécessiter par exemple l’utilisation d’une voiture – pêché capital de ce début de siècle. Si l’on considère que la diminution du trafic est un but en soi, on ne pourra que refuser ce mode de vie décadent.
    La  pensée libérale n’est pas aussi autoritaire. Les libéraux admettent que l’homme vit dans la nature, et non pas à côté. Cette perspective se conçoit avec l’idée que la nature est au service de l’homme, et pas l’inverse. Cela ne signifie nullement qu’il faille saccager les paysages ou bétonner le Léman, mais plutôt qu’il est permis à l’homme de s’installer à la campagne. Qu’il est même souhaitable de ne pas tout concentrer.
    Quand on oppose développement urbain au développement que l’on a connu jusqu’ici, force est de constater que l’on change complètement le paradigme que l’on connaissait jusqu’ici. Aujourd’hui, c’est d’abord l’individu qui décide en fonction des règlements établis par les communes, conformément aux plans directeurs cantonaux qui doivent se conformer aux plans sectoriels de la Confédération. Le véritable pouvoir reste dans les mains de la localité, voire du citoyen. Les nouveaux projets de loi inversent ce principe. Dans un objectif planificateur, les grandes lignes de la planification cantonale seront déjà décidées « en haut ». C’est d’ailleurs là le seul moyen d’imposer un développement urbain aux dépens d’un développement de la campagne que les citadins voient parfois d’un mauvais œil.
    Cette planification est dangereuse. Elle condamne à l’oubli silence toute une partie de notre histoire, de nos traditions. L’opposition ville – campagne ne doit pas aboutir au remplacement de l’une par l’autre, les deux sont complémentaires et indispensables, même dans une perspective de croissance de l’espace habité. Or, on a tendance à vouloir imposer les goûts des uns aux habitudes des autres. Développer la ville est nécessaire, voire urgent face au manque de logement dans les zones à forte densité. Il n’est pas pour autant indispensable de traiter les habitants de la campagne comme des indiens dans une réserve au service des hobbies citadins. Vous voulez vivre dans une villa à la campagne ? Je ne vois pas au nom de quoi on devrait vous en empêcher. La réponse libérale à cette question montre que le développement urbain à l’exclusion des autres est de gauche alors que le développement en général est de droite.

  • Malgré quelques défauts, le passeport biométrique est un progrès

    Les Suisses sont réputés méfiants face à la récolte de données que la Confédération pourrait entreprendre. Les nouveaux documents d’identité en sont un exemple, plus ou moins imposés par les accords de Schengen. Ceux-ci auront la particularité d’être munis d’une puce RFID qui contiendra les données actuellement existantes en format numérique, agrémentées de deux empreintes digitales.
    Le projet avait fait l’objet d’un large consensus au Parlement et il ne se trouvait aucun parti pour lance le référendum. C’est un groupe de citoyens – principalement d’extrême gauche – qui a utilisé les possibilités d’internet récolter les 50’000 signatures qui nous amèneront tous aux urnes le 17 mai prochain.
    Les opposants arguent que les informations récoltées seront stockées dans une base de donnée fédérale. Si cela est vrai, il est important de rappeler que la Confédération pratique ainsi depuis 2003 pour nos bons vieux passeports analogiques, sans soulever de problème jusqu’alors. Si l’on ne peut que s’opposer avec conviction à un fichage de la population par l’Etat, les données des passeports biométriques ne sont pas suffisamment sensibles pour entrer dans cette catégorie: une photo, quelques informations de base (âge, taille, couleur des yeux, des cheveux), et les empreintes digitales. À peine plus détaillées qu’un bon bottin de téléphone et beaucoup moins précises que ce que chacun abandonne volontairement sur facebook, ces données ne peuvent servir qu’à contrôler la véracité d’un document d’identité, voire (et cela n’est même pas prévu) à établir plus facilement les suspects dans une affaire criminelle. Le nouveau passeport n’est pas une super carte cumulus qui contrôlera vos moindres faits et gestes. Peut-être que le terme « biométrique » fait peur, retrouvant le fantasme contemporain de l’eugénisme lié aux recherches en matière de génétique ? Rappelons simplement que l’empreinte digitale ne renferme pas de donnée personnelle, est plus précise tout en étant moins sensible qu’une photo quant à la préservation de l’anonymat de l’utilisateur. Et n’a rien à voir avec le fameux ADN.
    Je m’étonne de constater à quel point les mêmes milieux peuvent se plaindre de l’atteinte à la sphère privée que constituerait l’enregistrement d’empreintes digitales, sans s’émouvoir une seconde de ce problème face à la fin programmée du secret bancaire. Ce dernier principe est pourtant davantage essentiel dans la protection de la personnalité de l’individu. Les risques d’atteinte de l’Etat contre la sphère privée sont largement amplifiés par un accès détaillé aux informations quant aux ressources de l’individu que par la forme du dessin du bout de ses doigts. À moins d’être un criminel, et encore…
    À bien y réfléchir, le passeport biométrique présente quelques défauts pratiques. Son prix ou le fait que la technologie nécessite un regroupement des centres d’enregistrement. Globalement, il offre pourtant des garanties contre la falsification des documents d’identité et constitue un progrès indéniable dans la lutte contre le crime organisé et le terrorisme. Sans être parfaite, cette loi mérite d’être acceptée.

  • Alerte enlèvement : et si on agissait pour une fois ?

    Les événements tragiques du week-end dernier ont relancé le débat sur la nécessité d’adopter un plan « alerte enlèvement » tel qu’expérimenté avec succès en France. Débat, oui et non. Il paraît en effet assez difficile de trouver un quelconque opposant à cette mesure aussi simple qu’efficace.
    Pour rappel, ce système se définit comme la mission confiée aux différents opérateurs de relayer les avis de recherche des personnes portées disparues. On citera par exemple l’obligation de diffuser les avis à la télévision, à la radio, sur les panneaux autoroutiers, dans les gares, ou encore par MMS. Ce plan qui existe en France a montré ses qualités : sans être absolument infaillible, il transforme chaque citoyen en surveillant et a déjà permis à plusieurs reprises d’empêcher une tragédie.
    Alors, pourquoi pas en Suisse ? Le Conseiller aux Etats Didier Burkhalter a pourtant déposé une motion qui a remporté l’adhésion des Chambres. Le Département fédéral de justice et de police a répliqué que la question était du domaine de compétence des cantons. Elle a transmis la patate chaude à quelques conférences intercantonales afin d’uniformiser les procédures en matière d’avis de recherche. C’est ainsi qu’une idée simple est devenue une idée compliquée.
    Contrairement au Conseil fédéral, je pense que le plan « alerte enlèvement » ne relève pas de la compétence des cantons. Les télévisions, radios, autoroutes, gares ou opérateurs téléphoniques sont tous régis par des lois fédérales. La question n’est pas de créer une police fédérale ou d’imposer une nouvelle procédure pénale ; il n’est nullement nécessaire d’avoir l’accord des cantons pour leur mettre à disposition un outil de plus pour la recherche de personnes disparues. L’utilisation que les polices en feront peut s’appuyer sur un simple règlement d’utilisation. Mieux, l’accord des opérateurs n’est même pas indispensable puisque leur statut découle directement de la loi.
    Allons plus loin. Considérons le plan « alerte enlèvement » comme une urgence. Un nouvel enlèvement peut avoir au moment où j’écris ces lignes et il n’est pas acceptable de ne pas tout mettre en œuvre pour protéger les citoyens contre une poignée de maniaques. Les arguments juridico-fédéralistes du Conseil fédéral ne sont ni convaincants ni appropriés face à la gravité de la situation.
    L’article 165 de la Constitution fédérale permet au Parlement d’adopter une législation d’urgence. Qu’il le fasse. Introduisons dans la LRTV (Loi sur les Radios/Télévisions) et la LTC (loi sur les télécommunications) l’obligation pour les titulaires de concessions de diffuser les avis de recherches émis par les polices cantonales. Cela prend deux lignes, quinze minutes de débat et pourrait peut-être sauver des vies. C’est bien là l’essentiel.